Cher Monsieur l'Abbé,
Je me décide à vous répondre
publiquement puisque, publiquement, vous vous adressez à moi.
Si je vous lis bien, vous me faites
essentiellement deux reproches :
- de
parler de "pluralité liturgique"
- et de
vouloir "catholiciser la nouvelle messe".Et là dessus, vous me vouez
aux enfers et me dites indigne disciple de Mgr Lefebvre.
M'avez vous bien lu?
A) Vous me reprochez mon expression
"pluralité liturgique", mais vous dites : " Si encore vous
vouliez parler de "pluralité des rites dans l'Eglise", on vous
comprendrait et suivrait volontiers!".( C'est moi qui ajoute cela par taquinerie!)
Mon cher ami, veuillez lire
attentivement le paragraphe incriminé. C'est la quatrième conclusion de mon
commentaire sur l'encyclique du Saint Père : Ecclesia de Eucharistia. Permettez
moi de faire cette lecture avec vous.
" C'est pourquoi, ce me semble, on
se dirige vers une renaissance du pluralisme liturgique dans l'Eglise... Comme
il existait, du reste, en toute tranquillité avant la réforme liturgique, comme
le Concile Vatican II, lui-même, le confesse dans "Sacrosanctum
concilium"(n.4). De fait, il existait à côté du Missel Romain --lisez
bien, je souligne pour vous -- le rite lyonnais, le rite dominicain, le
rite cartusien pour la seule Eglise latine et peut-être d'autres encore, sans
compter les rites orientaux des Eglises orthodoxes uniates. Le Cardinal
Ratzinger le confessait lui aussi dans la conférence qu'il donnait aux
catholiques d'"Ecclesia Dei Adflicta" à Rome en 1998. Mais la réforme
liturgique a détruit cette riche variété" Il ne fallait plus qu'un
rite --toute Révolution est totalitaire-- celui de Paul VI. Mgr Bugnini
s'est lui-même déplacé à la Chartreuse pour faire abandonner aux chartreux leur
rite cartusien au bénéfice de celui de Paul VI. Ce temps du totalitarisme n'est
plus" Espérons le. Il a fait tant de tord... Nous approchons donc au
retour du pluralisme liturgique. L'encyclique du Pape en sera l'origine.
Et c'est peut-être la raison pour laquelle, dans l'encyclique elle-même, comme
pour en rappeler la légitimité, le Pape parle des différentes liturgies. Il
parle de celle de St Jacques au n. 23, de celle de St Jean Chrysostome au
n. 17, de celle de St Basile dans la note 91. Pourquoi ce rappel? Pour faire
bien? Pour faire riche ? Cultivé? Pourquoi pas pour accoutumer les esprits à
cette véritable réalité ecclésiale qu'est le pluralisme. Ah que les évêques de
France vont avoir du mal d'accepter cela? Mais le Pape a parlé. Causa finita
est.
Et c'est là que peut prendre tout son
sens, la phrase du Pape au n.49:"dans le respect des diverses traditions
ecclésiales légitimement constituées".
C'est bien le cas pour le rite romain
dit de St Pie V."
Voilà la lecture faite avec moi.
Mon cher ami, n'est-ce pas là votre
propre pensée exprimée?
Je m'apaise alors. Il n'y avait lieu de
faire ce tintamarre!
B) Vous me reprochez également de
vouloir "catholiciser" la nouvelle messe. Et vous dites:. Si
encore vous vouliez simplement dire "corriger la nouvelle messe", on
comprendrait et on pourrait vous suivre".
Là aussi, cher Monsieur l'abbé, me
permettrez-vous de vous demander de lire avec moi le paragraphe incriminé.
C'est dans la troisième conclusion de mon commentaire sur l'encyclique de
Jean-Paul II "Ecclesia de Eucharistia".
M'appuyant sur une phrase de Jean
Madiran, dans une interview à la revue de M.l'Abbé de Tanöuarn
"Certitudes", disant:"... Je ne suis pas opposé non plus à l'idée
d'une réforme de la réforme si dans la réforme il y a la rectification",
je concluais: "Je partagerais volontiers cette idée... C'est ce que fait,
aujourd'hui, le Pape par cette encyclique:"Ecclesia de Eucharistia".
Il corrige les points faibles, il donne la juste interprétation. Il donne la
rectification des omissions, des ambiguïtés de la réforme liturgique."
Vous voyez bien que, là encore,
j'exprime votre propre pensée. J'utilise même le mot, votre mot de
"correction". Jean Madiran, lui, utilise le mot rectification. Ce mot
a le même sens. Voyez le dictionnaire "le petit Robert", au mot
"rectification", il lui donne aussi le sens de correction :
Rectification 1) Action de rectifier; 2)
Rendre matériellement correct, conforme; 3) Rendre exact; 4) Faire disparaître
en corrigeant.
Je m'apaise de nouveau et vous redis :
il n'y avait pas lieu de faire tout ce tintamarre.
Si vous voulez d'autres explications,
demandez les moi, mais cette fois en privé. Je me permettrais encore et pour
conclure, un petit conseil: Vous dirigez, je crois, une école primaire à
Bogotta, en Colombie où vous êtes prieur: "apprenez à vos petits enfants à
bien lire. Ils éviteront de déclencher des guerres".
En vous redisant toute mon amitié, je
vous prie de croire à mes sentiments dévoués en N.S.J.C.
Abbé Paul
Aulagnier