Lettre apostolique du Souverain Pontife Jean Paul II pour le 40 e anniversaire de la Constitution « Sacrosanctum Concilium » sur la Sainte Liturgie.

 

 

Le 4 décembre de l’année 2003, jour anniversaire de la promulgation par le Pape Paul VI de la Constitution Sacrosanctum Concilium, premier fruit du Concile Vatican II, le pape publiait une lettre apostolique sur la Sainte Liturgie. Il l’adressait au Cardinal Arinze préfet de la Congrégation pour le Culte divin et la Discipline des Sacrements.

On en a très peu parlé.

Le Pape en profitait pour rappeler quelques bonnes vérités.

Entre autres :

 

a) la liturgie et son sens mystagogique

 

Il voit dans la Liturgie, l’œuvre ecclésiale, par excellence, qui est capable de répondre aux défis du monde moderne et particulièrement à son « sécularisme » et  « laïcisme ». La liturgie permet de « nourrir » la soif d’absolu qui demeure au cœur de tout homme. Mais faut-il encore en donner et en rappeler tout le sens spirituel.

 

 Le Pape écrit :

 

« Si l’on considère l’avenir, nombreux sont les défis auxquels la Liturgie est appelée à répondre. En effet, au cours de ces quarante années, la société  a subi de profonds changements, dont certains mettent à rude épreuve l’engagement ecclésial. Nous nous trouvons face à un monde où, même dans les régions d’antique tradition chrétienne, les signes de l’Evangile diminuent progressivement. La Liturgie est directement interpellée par ce défi.

A première vue, celle-ci semble être mise de côté par une société largement sécularisée. Mais le fait certain est que, malgré la sécularisation, à notre époque réapparaît, sous de nombreuses formes, un besoin renouvelé de spiritualité. Comment ne pas voir en cela la preuve qu’au plus profond de l’homme il n’est pas possible d’effacer la soif de Dieu ? Il existe  des questions qui ne trouvent de réponse que dans un contact personnel avec le Christ. Ce n’est que dans l’intimité avec Lui que chaque existence acquiert sa signification et qu’elle peut parvenir à vivre l’expérience de la joie, qui fit dire à Pierre sur le mont de la Transfiguration : « Maître ; il est heureux que nous soyons ici ». (Lc 9 33)

Face à cette aspiration avec Dieu, la Liturgie offre la réponse la plus profonde et efficace. Elle le fait en particulier dans l’Eucharistie, par laquelle il nous est donné de nous unir au sacrifice du Christ et de nous nourrir de son Corps et de son Sang. Il faut toutefois que les pasteurs fassent en sorte que le sens du mystère pénètre les consciences, en redécouvrant et en pratiquant l’art « mystagogique » si cher aux Pères de l’Eglise. Leur tâche consiste, en particulier, à promouvoir des célébrations dignes ». (OR du 23 décembre 2003 p6)

 

Nous sommes particulièrement sensibles à ce rappel du pape et à l’insistance qu’il met sur l’importance du sens spirituel de la liturgie, tellement oublié parce que totalement méconnu par ceux qui « font » au quotidien  la liturgie paroissiale. Le problème se situe donc au niveau des  études proposées aux séminaires.  

 

Nous renvoyons nos fidèles lecteurs au livre très heureusement réédité à l’initiative de l’abbé  Claude Barthe, intitulé « le sens spirituel de la liturgie » qui reprend les belles études de Guillaume Durand dans son « Rational des divins offices, en son livre IV sur la messe. L’abbé Barthe a écrit la préface du livre. Il écrit entre autre :

 

 « Pour Guillaume Durand, le seule spécificité de la divine liturgie réside en ceci : les cérémonies du culte ne signifient pas les mystères du Christ à la manière des figures imparfaites de l’Ancien Testament aujourd’hui disparues, mais elles manifestent le sens de ces mystères qui, quoique désormais révélés, restent largement cachés à nos yeux. Autrement dit, le sens allégorique de la liturgie est semblable au sens allégorique propre au Nouveau Testament. : les divins offices sont entièrement du côté de l’Evangile, même si un certain nombre d’éléments en eux rappellent le premier état de la Révélation. » (p 16)

 

Il conclue sa préface par ces mots : « On est aujourd’hui en présence d’une pratique du culte – de facto et quel que soit le débat sur les principes de la réforme et sur leur interprétation – qui tend à l’évanouissement du caractère sacré du langage liturgique et traduit une immanentisation du message chrétien. Bien entendu, la clef de tous les problèmes n’est pas dans les écrits de Guillaume Durand et d’Innocent III. Mais n’est-il pas évident que l’étude attentive des sources patristiques et médiévales ne peut que favoriser de futures reconstructions, de quelque manière qu’on les envisage ? Lettre et Esprit de la liturgie : le Rational des divins offices fait revivre son esprit, nous réapprenant le langage évangélique des similitudes et des paraboles, nous rappelant « que sur cette terre tout est signe, tout est figure, que le visible ne vaut que par ce qu’il recouvre d’invisible ».(p. 36). (Le sens spirituel de la liturgie aux édit. Ad solem)

 

Je suis sur que le Cardinal Ratzinger signe ces paroles.

 

b)  le silence dans la liturgie

 

Le pape rappelle également l’importance du silence dans la liturgie. Il écrit : « Un aspect qu’il faut cultiver avec une plus grande application au sein de nos communautés est l’expérience du silence. Nous avons besoin  de celui-ci pour accueillir dans nos cœurs la pleine résonance de la voix de l’Esprit-Saint, et pour unir plus étroitement la prière personnelle à la Parole de Dieu et à la voix publique de l’Eglise ». Dans une société qui vit de manière toujours plus frénétique, souvent étourdie par le bruit et distraite par l’éphémère, redécouvrir la valeur du silence est vital. Ce n’est pas un hasard si, même en dehors du culte chrétien, se diffusent des pratiques de méditation qui accordent de l’importance au recueillement. Pourquoi ne pas lancer, avec audace pédagogique, une éducation spécifique au silence au sein même des propres paramètres de l’expérience chrétienne ? Nous devons avoir à l’esprit l’exemple de Jésus, qui « sortit et s’en alla dans un lieu désert, et là il priait ». (Mc 1 35). La liturgie, dans ses divers moments et ses diverses manifestations,  ne peut pas négliger celui du silence ».

 

On retrouve les grandes idées aussi exprimées par le Cardinal Ratzinger dans ses différents ouvrages sur la liturgie, en particulier « l’esprit de la liturgie » aux éditions « ad Solem ».

 

Et à cette occasion, on se permet de poser la question :  « Quid de ce texte annoncé par le Pape, dans son Encyclique « Ecclesia de Eucharistia »devant paraître avant la fin de l’année 2003 et  devant remettre un  peu d’ordre dans la liturgie et son exercice dans les églises ? 

On dit qu’il est rédigé ?

Il a dû recevoir tellement de « corrections » imposées par certains épiscopats et experts en liturgie qu’il en a perdu toute  sa « force » originale et que les cardinaux responsables, le cardinal Arinze et le Cardinal Ratzinger ne veulent plus le publier en l’état.

 

C’est une simple hypothèse ! Mais je ne pense pas être très loin de la vérité.

Attendons de voir !