Paroisse catholique Saint Michel

Dirigée par

 Monsieur l'abbé Paul Aulagnier

 

Membre de la FSSPX

06 80 71 71 01

 

 

Semaine du 22 février 2004 au 28 février 2004

Dimanche de la Quinquagésime

 

 

 

 

Sommaire

 

Homélie du dimanche de la Quinquagésime

« Au dimanche de la Septuagésime, l’Eglise nous appelait, il vous en souvient, à aimer la victoire, à aimer gagner le trophée : la vie éternelle. Elle nous encourageait à courir pour obtenir le Royaume de Dieu, comme le coureur dans le stade. A courir avec énergie et courage pour saisir le prix : la vie éternelle.

Et si le coureur fait tant d’efforts pour la victoire, c’est qu’il aime la victoire, le prix de la course. Il se prive. Il s’exerce. Il multiplie les efforts, les entraînements parce qu’il aime, il veut la victoire. L’Eglise nous donnait cet exemple. Vous devez courir, vous aussi, comme dans un stade, pour remporter la victoire : la vie éternelle.

Cette vie éternelle, ce royaume de Dieu – ce prix – est peut-être ultime dans l’ordre de la réalisation. Il est premier dans l’ordre de l’intention. Il préside à tous nos choix. Il est la raison de nos efforts, de nos amours, de notre combat. Il faut le vouloir pour l’avoir, un jour. Parce que l’on en a compris l’importance, on aime vouloir gagner cette vie éternelle. On en connaît la félicité, l’éternité, la beauté, l’objet : la possession inamissible de Dieu. Si la terre est déjà si belle, combien plus le Ciel. C’est pourquoi il est l’objet de notre amour.

C’est donc, finalement, la charité, c’est l’amour qui est la raison de notre recherche du Ciel, notre vie durant.

Et l’Eglise, dimanche dernier, le dimanche de la Sexagésime, nous mettait sous les yeux, un autre exemple concret, précis. Non plus un simple « quidam », un inconnu, un coureur quelconque. Non. Mais Saint Paul. Saint Paul, cette fois, nous était donné en exemple, lui qui vécut d’amour pour gagner le Ciel, pour posséder Jésus-Christ. Il aima Notre Seigneur Jésus-Christ plus que tout parce qu’il voyait en Notre Seigneur Jésus-Christ, « l’espérance de la gloire » i.e. la Vie Eternelle.

Ecoutez ce cœur enflammé.

Et gardez son exemple sous vos yeux, dans votre cœur, dans votre intelligence pour connaître, à votre tour, même amour. L’intelligence qu’il avait du salut voulu par Dieu pour nous et réalisé par son Fils Jésus-Christ, Notre Seigneur, est la raison de son amour, de sa charité immense pour Notre Seigneur. C’est pourquoi la charité est tout, dit-il dans son Epître aux Corinthiens. Elle se nourrit de la contemplation du Mystère de la Passion de Notre Seigneur. Saint Bernard nous le dit aussi.

Et voilà pourquoi nous avons, en ce dimanche de la Quinquagésime et cette épître sur la Charité, l’hymne à la Charité de Saint Paul, et cet Evangile où notre Seigneur annonce à ses disciples la Passion qu’il devra subir pour notre propre salut éternel.( Voyez, sans faute, le dossier sur le film : « La Passion du Christ » de MelGibson).(Cliquez ici).

En parcourant son chant d’allégresse dans ses lettres où il décrit ce salut de Dieu, nous en aurons, peut-être, nous aussi, une meilleure intelligence et un meilleur amour.
Ecoutez-le exprimer son amour pour Jésus-Christ.

« Pour son amour ( de NSJC), j’ai voulu tout perdre, regardant toutes choses comme de la balayure afin de gagner le Christ et d’être trouvé en Lui, non avec ma propre justice… mais avec celle qui naît de la foi dans le Christ, la justice qui vient de Dieu par la foi, afin de le connaître Lui et la vertu de sa résurrection, d’être admis à la communion de ses souffrances, en lui devenant conforme dans sa mort, pour parvenir, si je le puis, à la résurrection des morts (i.e. à la Vie Eternelle).
Ce n’est pas que j’ai déjà saisi le prix… mais je poursuis ma course pour tacher de le saisir, puisque j’ai été saisi moi-même par le Christ. Pour moi, frères, je ne pense pas l’avoir saisi, mais je ne fais qu’une chose : oubliant ce qui est derrière moi, et me portant de tout moi-même vers ce qui est en avant, je cours droit au but, pour remporter le prix auquel Dieu m’a appelé d’en haut en Jésus-Christ ».

Merveilleux ! Non !

Que ce soient là nos sentiments, à nous aussi qui « sommes arrivés à l’âge d’homme ».

« … Marchons comme nous l’avons déjà fait jusqu’ici
« Ayez les yeux sur ceux qui marchent suivant le modèle que vous avez en nous. Car il en est plusieurs qui marchent en ennemis de la Croix de Christ :…leur fin c’est la perdition, eux qui font leur Dieu de leur ventre et mettent leur gloire dans ce qui fait leur honte, n’ayant de goût que pour les choses de la terre.
Pour nous, notre cité est dans les cieux d’où nous attendons aussi comme sauveur le Seigneur Jésus-Christ qui transformera notre corps si misérable à son corps glorieux par sa vertu puissante qui lui assujettit toutes choses.
C’est pourquoi, mes chers et bien aimés frères, ma joie et ma couronne, tenez ainsi fermes dans le Seigneur, mes biens aimés » (Eph 2 )

Merveilleux ! Non !

Ecoutez encore. Tous ces textes ne sont pas assez connus des fidèles. Il faudrait que tous les fidèles de la Tradition les connaissent par cœur.

« Qui nous séparera de l’amour du Christ ? Sera-ce la tribulation ou l’angoisse ou la persécution ou la faim ou la nudité ou le péril ou l’épée… Mais dans toutes ces choses, nous sommes plus que vainqueurs par celui qui nous a aimés. Car j’ai l’assurance que ni la mort ni les choses présentes ni les choses à venir ni les puissances ni les hauteurs ni les profondeurs ni aucune créature ne pourra nous séparer de l’amour de Dieu dans le Christ Jésus Notre Seigneur ». (Rm 8 35)

Et pourquoi ce langage ? Pourquoi cette foi ? Pourquoi cet amour de Dieu si fort, si tenace, si puissant ?
Parce que Dieu est la Sagesse, la Bonté, la Miséricorde, l’Amour premier. Nous retrouvons encore ici l’enseignement de Saint Bernard.

Ecoutez le langage de Saint Paul qui fait éclater dans toutes ses lettres la bonté de Dieu. On comprend qu’il soit attaché, en tout à cet amour.
Il aime Dieu et chante sa reconnaissance en raison de sa bonté, Lui qui a fait de nous ses enfants, ses fils adoptifs « dans le Christ ».

Ecoutez :
« Bénis soit Dieu, le Père de NSJC qui nous a bénis dans le Christ de toutes sortes de bénédictions spirituelles dans les cieux. C’est en Lui (NSJC) qu’il nous a choisi dès avant la création du monde pour que nous soyons saints et irrépréhensibles devant Lui, nous ayant dans son amour prédestinés à être ses fils adoptifs par Jésus-Christ, selon sa libre volonté, en faisant ainsi éclater la gloire de sa grâce par laquelle il nous a rendus agréables à ses yeux en son Fils bien aimé. C’est en Lui que nous avons la rédemption acquise par son sang, la rémission des péchés selon la richesse de sa grâce, que Dieu a répandu abondamment sur nous en toute sagesse et intelligence, en nous faisant connaître le mystère de sa volonté selon le libre dessein que s’était proposé sa bonté pour le réaliser lorsque la plénitude des temps serait accomplie : à savoir de réunir toute chose dans le Christ Jésus.
C’est en Lui que vous-même, après avoir entendu la parole de vérité, l’Evangile de votre salut, c’est en Lui que vous avez cru et que vous avez été marqués du sceau du Saint-Esprit qui avait été promis et qui est comme un gage de notre héritage, en attendant la pleine rédemption de ceux que Dieu s’est acquis à la louange de sa gloire ».

Merveilleux ! Non !

Voilà le plan divin.
Voilà le don divin.
Voilà notre rédemption annoncée, voulue, réalisée par Notre Seigneur Jésus-Christ et l’Esprit-Saint.
Voilà notre héritage promis, notre gloire, notre éternité.
Voilà quelle est l’œuvre de la charité de Dieu, de son bon vouloir, de son libre vouloir.
Voilà ce qui enthousiasme Saint Paul.
Voilà ce qui fait naître en lui sa charité. Il dira lui-même : « Je sais en qui j’ai mis mon espérance ».

Vous savez, dira ailleurs Saint Paul, vous savez « quelle est l’espérance à laquelle (Dieu) vous a appelés, quelles sont les richesses de la gloire de son héritage réservés aux saints (vous), et quelle est …la suréminente grandeur de sa puissance, attestée par l’efficacité de sa force victorieuse. Cette force, il l’a déployée dans le Christ lorsqu’il l’a ressuscité des morts et la fait asseoir à sa droite dans les cieux…Il a tout mis sous ses pieds et il l’a donné pour chef suprême à l’Eglise qui est son corps, la plénitude de celui qui remplit tout en tous ».

Merveilleux ! Non !


C’est la contemplation, la connaissance de cela, de cette puissance divine, de son plan de salut en Son Fils Jésus-Christ, le Christ, l’Oint, l’Attente des Nations… qui comble de joie et d’amour de reconnaissance notre grand Saint Paul.

Nous étions morts par nos offenses et nos péchés.
Nous marchions autrefois selon le train de ce monde, selon le Prince de la puissance de l’air, selon l’esprit des fils de la désobéissance.
Nous vivions autrefois selon les convoitises de la chair et de nos propres pensées.
Nous étions, par nature, jadis, « enfants de la colère » comme les autres qui étaient et sont toujours sans espérance
Mais aujourd’hui, grâce à Dieu qui est riche en miséricorde, à cause du grand amour dont il nous a aimés et alors que nous étions morts par nos offenses, Il nous a rendus vivants avec le Christ, grâce au Christ, grâce à sa passion, grâce à son sacrifice, grâce à son anéantissement : « C’est par grâce que nous sommes sauvés »
C’est par grâce que nous sommes ressuscités, ensemble, qu’il nous a fait asseoir ensembles dans les cieux en Jésus-Christ afin de montrer dans les siècles à venir l’infinie sagesse de sa grâce par sa bonté envers nous en Jésus-Christ.

Oui, poursuit Saint Paul, tout enjoué, tout admiratif du don de Dieu : « C’est par grâce que (nous sommes) sauvés par le moyen de la foi et cela ne vient pas de (nous), c’est le don de Dieu. Ce n’est point pour les œuvres, nos œuvres, afin que nul ne se glorifie. Car nous sommes son ouvrage ayant été créés en Jésus-Christ pour faire de bonnes œuvres que Dieu a préparées d’avance afin que nous les pratiquions » (Eph 1 15).

Ah, si je vous demandais où Saint Paul trouve sa joie, cette force, cette allégresse, cet amour de Dieu,
Vous me répondriez maintenant, sûrement, dans la connaissance parfaite qu’il a de Dieu, de son mystère, de son plan de salut résumé, centré, ordonné autour de NSJC, sa Passion et sa Résurrection.

C’est précisément ce mystère que l’Eglise propose aujourd’hui à notre contemplation, à notre admiration, à notre joie , à notre bonheur pour faire croître en nous l’amour de charité c’est-à-dire un amour cultuel, un amour de religion, un amour d’adoration ;

Le mystère du Christ, de la Passion du Christ, c’est ce que Jésus commence, en ce dimanche, d’exposer aux Apôtres : « Voici que nous montons à Jérusalem et que s’accomplira tout ce qui a été écrit par les prophètes au sujet du Fils de l’homme. Il sera livré aux païens, tourné en dérision, outragé, couvert de crachats ; après l’avoir flagellé, on le mettra à mort. Et le troisième jour, il ressuscitera ».

C’est à Jérusalem, dans la Cité Sainte, hors les murs, que s’accomplira le mystère du salut – au Golgotha – le mystère de la paix entre Dieu et les hommes…grâce à l’anéantissement du Fils de Dieu, fait chair, que s’accomplira le mystère du pardon, le mystère de la justice, le Fils devenant pour nous, justice de Dieu, rançon, prix –et quel prix- sang versé pour notre délivrance. Lui, le « Fort » a terrassé le « fort » - le diable- Oui, au Golgotha, c’est là « qu’est mort la mort » et que renaît la vie, la vie divine, la vie de nos âmes ; là, que l’auteur de la mort –le diable- a été attaché, traîné derrière le char du triomphateur : Notre Seigneur Jésus-Christ.
C’est là que « la captivité est devenue captive ». C’est là que la terre, sous l’effet d’une nouvelle bénédiction qui la rajeunît, refleurit, alors que, hier encore, sous l’antique malédiction, elle ne produisait que ronces et chardons. Vous reconnaissez la pensée de Saint Bernard.
C’est là, au Golgotha – par et dans le sang du Christ, que « la Nouvelle Alliance » a été scellée qui nous donne « droit » et accès à l’héritage éternel. Loué, alors, soit Jésus-Christ. Telle est la messe catholique. Une nécessaire action de grâces.
C’est là, au Golgotha, grâce à la Passion sanglante du Christ-Jésus, grâce à ce prix à cette rançon que nous avons accès aussi à la justice de Dieu. Alors, loué soit Jésus-Christ ! Telle est la messe catholique. Acte de justice par excellence. Justification des Nations baptisées.
Car « Dieu a établi Jésus-Christ pour être la victime de propitiation, par la foi dans son sang, montrant tout ensemble qu’Il est juste lui-même et qu’Il justifie celui qui a la foi en Jésus-Christ « (Rm 3 25)
C’est là, au Golgotha, que Jésus-Christ « se fait le médiateur du Nouveau Testament afin que, par sa mort, ceux qui sont appelés reçoivent l’héritage éternel qui leur a été promis ». Alors, loué soit Jésus-Christ. Telle est la messe catholique. Une eucharistie qui « est gage d’éternité ». « Qui mange mon corps et boit mon sang a la vie éternelle ».
C’est là, au Golgotha, que le Christ, le Messie, s’est fait homme de la douleur et aussi le sauveur, en portant sur lui nos iniquités comme Isaïe, le prophète l’avait jadis annoncé : « Il s’est élevé devant lui comme un frêle arbrisseau, comme un rejeton qui sort d’une terre desséchée. Il n’avait ni forme ni beauté… Il était méprisé et abandonné des hommes, homme de douleur et familier de la souffrance…Vraiment c’était nos maladies qu’il portait et nos douleurs dont il s’était chargé…Lui a été transpercé à cause de nos péchés, broyé à cause de nos iniquités. Le châtiment qui nous donne la paix a été sur lui et c’est par ses meurtrissures que nous sommes guéris…On le maltraite et lui se soumet…Il a plu à Yahweh de le briser par la souffrance…Mais quand son âme aura offert le sacrifice expiatoire, il verra une postérité, il prolongera ses jours…A cause des souffrances de son âme, il verra et se rassasiera…Le juste, mon serviteur, justifiera beaucoup d’hommes. C’est pourquoi je lui donnerai sa part parmi les grands » (Is 53)

Et cette justification sera gratuite, un acte de pure libéralité, de pure bonté.
Et de cet acte de justice et de miséricorde, tous, qui me lisaient, baptisés, régénérés dans les eaux baptismales, nous en bénéficions, nous en sommes les joyeux « affectataires ». « Nous sommes son ouvrage », dit Saint Paul (Eph 2 10). Et les « autres », sans baptême, ou l’oubliant qu’attendez- vous pour vous tourner vers ce Dieu d’amour !
Il est, Lui, notre sanctification, notre justification, notre espérance ; il est notre gloire.
« En Lui, dira Saint Paul, l’espérance de la gloire. Il est notre richesse. Il est notre vie.

Voilà le mystère de Dieu qui enthousiasme mon cœur.
Voilà le dessein éternel que Dieu a réalisé par son Fils au Golgotha. « Notre Seigneur, en qui, nous avons par la foi en Lui, la hardiesse de nous approcher de Dieu avec confiance ».

Et « à cause de cela, dit Saint Paul, je fléchis le genou devant le Père, de qui tire son nom toute famille dans les cieux et sur la terre, afin qu’il vous donne , selon les trésors de sa gloire, d’être puissamment fortifiés par son Esprit en vue de l’homme intérieur et que le Christ habite dans vos cœurs par la foi, de sorte qu’étant enracinés et fondés dans la charité, vous deveniez capables de comprendre avec tous les saints quelle est la largeur, la longueur, la profondeur et la hauteur, même de connaître l’amour du Christ qui surpasse toute connaissance en sorte que vous soyez remplis de toute la plénitude de Dieu » (Eph 3 12 ).

 

Traité de l’Amour de Dieu de Saint Bernard

Chapitre V : « de la dette d’amour qui incombe au chrétien »

14 . Celui qui fait toutes ces réflexions, voit clairement, je crois, pourquoi l’on doit aimer Dieu, c'est-à-dire quel amour Dieu mérite. Mais l’infidèle, qui ne connaît pas le Fils, ignore par conséquent le Père et le Saint Esprit. Car celui qui ne glorifie pas le Fils, ne glorifie pas non plus le Père, qui l’a envoyé, ni le Saint-Esprit, qu’à son tour envoya le Fils. Il ne faut donc pas s’étonner que, connaissant Dieu moins que nous, il l’aime moins. Lui aussi, toutefois, sait bien qu’il se doit tout entier à ce Dieu qu’il reconnaît pour l’auteur de tout son être. Mais moi, à plus forte raison, je suis redevable de cet amour, puisque non seulement je considère mon Dieu comme celui qui gratuitement m’a donné la vie, qui s’en est fait le généreux ordonnateur, le doux consolateur et le guide attentif ; puisque en outre je vois en lui mon Sauveur, celui qui pour l’éternité a la bonté de conserver ma vie, de l’accomplir et de l’introduire dans la gloire. Il est écrit : « Son rachat est très abondant » et : « Il est entré une fois pour toutes dans le Sanctuaire, après nous avoir acquis une Rédemption éternelle » (Hb 9 12). Et au sujet de la conservation : « Il n’abandonnera pas ses saints qui seront gardés pour l’éternité » (Ps 36 28). Et pour l’abondance : « ils verseront dans votre sein une bonne mesure, presse, tassée, débordante » (Lc 6 38), et ailleurs : « L’œil n’a pas vu, l’oreille n’a pas entendu, le cœur de l’homme n’a pas compris ce que Dieu a préparé à ceux qui l’aiment » (1 Cor 2 9). Quant à la glorification : « Nous attendons le Sauveur, Notre Seigneur Jésus-Christ, qui refera le corps de notre humilité en le conformant au corps de sa splendeur » (Phil. 3 21) Et ailleurs : « Les souffrance de cette vie ne sont pas à la mesure de la gloire qui un jour sera manifestée en nous » (Rm 8 18). Et enfin : « Ce court moment de si peu de poids, de nos présentes afflictions produit en nous, hors de toute mesure, un poids éternel de gloire dans les cieux, si du moins nous ne considérons pas les choses visibles, mais les invisibles ». (2 Cor 4 17-18)

15 ; Que rendrais-je au Seigneur, en échange de toutes ces grâces ? La raison et l’équité naturelle veulent que je me donne tout entier à celui dont je tiens tout ce que je suis, et m’enjoignent de l’aimer de tout mon être. Mais la foi m’enseigne que je dois l’aimer d’autant plus que je comprends mieux à quel point il est au-dessus de moi : car je sais qu’il m’a donné non seulement mon être, mais par surcroît le sien propre. Car enfin, le temps de la foi n’était pas encore venu, Dieu ne s’était pas encore manifesté dans la chair, n’était pas mort sur la croix, sorti du tombeau, retourné auprès de son Père ; il n’avait pas encore donné toutes ces marques du très grand amour dont nous avons parlé longtemps tout à l’heure, et déjà l’homme avait reçu le commandement d’aimer le Seigneur son Dieu de tout son cœur, de toute son âme, de toutes ses forces (Deut 6 5), c’est-à-dire de tout ce qu’il est, sait et peut. Dieu cependant ne se montrait pas injuste en réclamant dès lors son œuvre et ses dons. Comment l’ouvrage, s’il est doué de la faculté d’aimer, n’aimerait-il pas l’artisan qui l’a fait ? Et pourquoi ne l’ aimerait-il pas de toutes ses forces, alors que ce pouvoir d’aimer lui vient encore de ce même artisan ? De plus, il a été tiré du néant, par pure bonté, et élevé à la plus haute dignité ; cela rend plus évident la dette d’amour et plus stricte l’obligation de s’en acquitter. Et puis, Dieu a ajouté immensément à ses bienfaits envers nous, lorsqu’il sauva les hommes et les bêtes par la surabondance de sa grâce. Je parle de nous qui avons changé notre gloire première en la ressemblance du bœuf broutant l’herbe et qui, par nos péchés, sommes devenus pareils aux bêtes privées de raison. (Ps 48 13). Si déjà je me dois tout entier pour prix de ma création, qu’ajouterai-je en échange de ma réparation, et surtout de cette réparation-là ? Il n’a pas été aussi facile de me refaire que de me faire. Il est écrit, non seulement à mon sujet, mais à propos de tout ce qui a été créé : « Il dit, et les choses furent faites » (Ps 148 5). Mais celui qui pour me faire n’a eu besoin que d’une seule parole, a dû, pour me refaire, en prononcer beaucoup, et accomplir des actes miraculeux, et subir de dures peines : non seulement dures, mais indignes de lui. Que rendrai-je donc au Seigneur en échange de tout ce qu’il m’a donné ? Dans sa première œuvre, il m’a donné à moi-même ; dans la seconde, il s’est donné à moi et, en se donnant, il m’a rendu à moi-même. Donc, donné puis rendu, je me dois pour prix de moi-même, et je me dois deux fois. Mais que vais-je rendre à Dieu pour prix de lui-même ? Quand je pourrais me rendre mille fois, que suis-je en comparaison de Dieu ? :

Deux mots de commentaire


Ce chapitre est un chapitre de conclusion. Il est très beau. Il a l’avantage d’être aussi très simple. Saint Bernard tire les conséquences des chapitres précédents. Nous pourrions le résumer ainsi : et pour des raisons naturelles : la création, et pour des raisons surnaturelles : la rédemption, notre justification, nous devons aimer Dieu de tout notre cœur, de toutes nos forces. Ce commandement était vrai, déjà avant la Rédemption accompli, sous l’Ancien Testament. A combien plus forte raison, l’est-il dans le Nouveau Testament, où les motifs d’aimer Dieu se sont comme multipliées et dans une proportion incommensurable. Dans ce sens là, pour le prouver, vous pouvez invoquer tout le paragraphe 15

Vous remarquerez également que, pour Saint Bernard, aimer Dieu est une affaire de « justice et d’équité » Son expression est très claire : « Dieu a mérité notre amour ». Notre amour pour Dieu est un dû. Il ne dépend en rien de nos caprices ou de nos états d’âme Que nous nous soyons levés du « pied gauche » ou non, Peu importe ! Dieu doit être aimer. La religion n’est point une affaire de sentiments intérieurs, de ma psychologie. Dieu est. Dieu est mon créateur. Dieu est mon Sauveur. Tous ces actes vrais sont tout autant des actes d’amour. Dieu a ainsi mérité mon amour. Il doit être aimé en retour et d’une manière absolue.

Voilà un texte qui peut nourrir votre méditation.


Le film de Mel Gibson : « la Passion du Christ »

 

« La Passion du Christ » de Mel Gibson sort le 25 février 2004 aux Etas-Unis.

« C’est un événement d’envergure mondiale que la prochaine sortie du film de Mel Gibson » Ainsi s’exprimait le Journal Présent du 12 février 2004.

Il publiait, en quatrième page, une interview de Daniel Hamiche.

C’est lui qui, en France, suivit « l’affaire » avec le plus de compétence et de juste passion.

Encore au Canada, je luis avais donné libre accès dans les « colonnes » d’ITEM. Il nous avait donné de très bons papiers, très intéressants, parfaitement documentés, de très bonne facture. Nous vous encourageons fortement à les lire ou relire aujourd’hui.

Avec l’aimable autorisation de Présent et de sa direction, que je remercie, je suis heureux de compléter notre dossier en publiant aujourd’hui sa récente interview au journal.
Vous pourrez y ajouter la lecture du témoignage du Cardinal Castrillon-Hoyos, témoignage particulièrement senti.

Ainsi vous saurez tout !

Il ne vous restera plus que de prendre le temps d’aller le voir lorsqu’il sera sur nos écrans en France.

Ce film et son auteur Mel Gibson, qui ont déjà rencontré beaucoup de difficultés - voyez les articles de Daniel Hamiche sur ITEM et son interview dans Présent - pourraient bien en rencontrer encore. Aussi je ne peux que vous encourager à soutenir l’association « Pro Passio ». Vous avez tous les coordonnés dans l’article de Présent.

“La Passion du Christ” sort le 25 février aux Etats-Unis
Daniel Hamiche répond à nos questions


C’est un événement d’envergure mondiale que la prochaine sortie du film de Mel Gibson retraçant la Passion du Christ. Le film s’annonce d’une grande profondeur théologique, capable de changer les cœurs en faisant méditer – avec quel réalisme ! – sur le Sacrifice de Notre Seigneur. Daniel Hamiche, qui a fondé une association française de défense du film, « Pro Passio », connaît toute l’affaire à fond.
– Daniel Hamiche, on sait que le script du film a été volé, mais également une version vidéo non définitive puisque le montage n'est pas achevé. Ces vols ont servi à une campagne d’accusations sur le prétendu « antisémitisme » de La Passion du Christ. Ces procédés ne vont-ils pas malgré eux servir le film de Mel Gibson ?
– Il est tout à fait vrai qu’un script (sans doute daté du 2 octobre 2002, et je rappelle que le tournage du film a commencé le 4 novembre suivant...), a été volé dans les locaux d’Icon, qui se trouvent sur la côte Ouest des États-Unis, et qu’il a « mystérieusement » abouti sur le paillasson d’un rabbin de la côte Est qui se serait empressé de le transmettre à des amis engagés dans le « dialogue » judéo-catholique, des « catholiques » néo-modernisants et des juifs ultra-sécularisés. Il est aussi tout à fait vrai qu’une copie du film a été, également, volée chez Icon et qu’elle a servi à un tabloïd new-yorkais, pour dénigrer le film. Il est encore vrai, et je l’apprenais voici quelques jours, que le rabbin Marvin Hier, président du Simon Wiesenthal Center et « doyen » de la Yeshiva de Los Angelès, avait visionné une cassette vidéo du film. D’où venait-elle ? Cette histoire est vraiment d’abord une histoire de voleurs et de menteurs. Toutefois, comme vous le laissez entendre, il convient de remercier chaleureusement les « catholiques » néo-modernisants, le Simon Wiesenthal Center et l’Anti-Defamation League-ADL (ou B’nai B’rith) de la publicité gratuite et massive qu’ils ont faite pour ce film.
– A propos de cette accusation d'antisémitisme : comment le film répond-il à la question : « Qui a tué le Christ ? »
– Il n’y a pas d’antisémitisme dans ce film, pas plus qu’il n’y en a dans les Saints Évangiles. Ceux qui insinuent que le film serait antisémite, soit ne l’ont pas vu, soit reprennent une vieille scie anticatholique selon laquelle, effectivement, les Saints Evangiles seraient antisémites. Va-t-on bientôt déférer Luc, Matthieu, Marc et Jean (et leurs nombreux éditeurs ou commentateurs) devant la XVIIe chambre correctionnelle ? C’est insensé et ridicule. Mel Gibson n’a assurément pas voulu, dans son film, faire porter la « responsabilité » de la mort du Seigneur par quelque groupe que ce soit (Juifs ou Romains). Il a au contraire voulu dire que ce sont les péchés de l’humanité (c’est-à-dire, d’abord, les nôtres) qui ont provoqué la Passion du Seigneur, dans laquelle Il est entré librement. Personne ne Lui a pris Sa vie, puisque c’est Lui qui l’a donnée. Une preuve, parmi mille autres : Mel Gibson, pécheur comme chacun de nous, a voulu montrer sa propre responsabilité, puisque, à défaut de jouer dans ce film qu’il a produit et réalisé, c’est sa propre main qui tient le clou dont on va transfixer le Seigneur sur le patibulum de la Croix !
– Est-ce à dire que si tous les hommes sont responsables, aucun ne le serait en particulier ?
– Il faut laisser Dieu seul en juger. Toutefois, si nous quittons le domaine de la théologie pour entrer dans celui de l’histoire, nous devons admettre, conformément au Nouveau Testament (confirmé par nombre de textes talmudiques), que c’est bien Caïphe, avec une bonne partie du sanhédrin, qui a livré le Seigneur à l’occupant romain, et que c’est Pilate qui a pris la décision finale de le faire crucifier à la demande des premiers. C’est très exactement ce qu’énonce la déclaration Nostra Ætate, dans ses paragraphes sur le judaïsme. Elle n’exonère pas « des responsables juifs », du fait, historiquement avéré, d’avoir livré le Seigneur aux Romains pour qu’Il fût tué. Elle dit, plus simplement, que cet acte ne saurait être imputé à tous les Juifs vivant à l’époque de l’événement, et pas davantage, a fortiori, à tous les Juifs qui sont venus après ou à ceux qui sont nos contemporains. Autrement dit, le sens de cette déclaration, c’est de rappeler que la « responsabilité collective » de la Passion et de la mort du Seigneur ne repose pas sur « les Juifs », mais sur toute l’humanité, Juifs y compris. Ce n’est rien d’autre qu’un rappel de la théologie du concile de Trente. C’est exactement ce que Mel Gibson met en images dans son film.
– Au-delà d’un simple récit de la Passion, des spectateurs des pré-projections comme le Père di Noia ont vu dans le film une très fine et très puissante « démonstration » théologique sur l'unité de sacrifice entre la Cène et la Crucifixion.
– Vous avez raison d’évoquer le R.P. Augustin Di Noia, qui a en effet vu un prémontage du film à Rome, et qui se trouve être le « n° 3 » de la Congrégation pour la doctrine de la foi. Son témoignage est des plus positifs, non seulement quant aux qualités artistiques du film, mais surtout pour sa justesse théologique et sa saine doctrine catholique. C’était d’ailleurs le même sentiment qui animait le cardinal Castrillon Hoyos qui, après avoir vu, lui aussi, un prémontage, en compagnie du réalisateur, a qualifié ce film de « triomphe d’art et de foi ». Il est évident, et c’était là le projet explicite de Mel Gibson – outre sa volonté de glorifier le Seigneur par une œuvre d’art –, que La Passion du Christ sera un formidable instrument d’évangélisation, excitant davantage encore les piétés ardentes, ranimant les tièdes, embrasant les éteintes et suscitant, même chez les indifférents, une émotion profonde et intime devant le spectacle des atroces souffrances physiques et morales acceptées pour prix du rachat de l’humanité par notre divin Rédempteur. Des milliers de spectateurs, américains essentiellement, ont pu, depuis plus de six mois, assister à des projections privées de l’œuvre inachevée de Gibson : pleurs et sanglots, contrition et conversion, partout et pour tous. C’est l’avant-goût de ce qui nous attend…
– Qu'apporte selon vous l'image réaliste aux récits poignants de la Passion par les évangélistes ?
– Nous vivons dans un monde dominé par l’image. L’image n’est pas « nouvelle » : les Chemins de Croix de nos églises, les vitraux de nos cathédrales, les calvaires de nos villages, les images pieuses de nos missels ou de nos foyers, tout cela a toujours existé et excité la piété d’innombrables générations. Mais l’image n’avait pas, à ces époques, l’omnipotence qu’elle a acquise de nos jours. C’est un fait, et je crois qu’il n’est pas sot de tenir compte des faits ! À cet égard, le film de Mel Gibson, qui est une « mise en images » (et quelles images !) de la Passion du Seigneur, me semble adéquat à la culture contemporaine de l’image. En outre, qui dit film dit bien sûr salles de cinéma, mais aussi télévision, VHS, DVD et… l’incontournable internet. Tout cela va assurer à la fois une formidable diffusion universelle, j’allais dire « de masse », du film, mais aussi en permettre un visionnage plus intime, voire même solitaire. La Passion du Christ constitue, et va constituer, un outil pour l’évangélisation, parce qu’il est « adapté » aux techniques et à la culture modernes. Mais enfin, il n’est pas interdit de voir dans tout cela une sorte de « prédestination ». N’a-t-il pas fallu attendre dix-neuf siècles pour que le Linceul du Sauveur, grâce aux techniques contemporaines, passe du statut de vénérable relique, à celui d’objet d’études scientifiques multidisciplinaires, pour se « révéler » enfin comme « image » et paraphrase de ce que les mots des Évangiles nous apprennent ou nous suggèrent ?
– On a parlé de miracles et de prodiges lors du tournage : qu'en est-il ? Est-ce que toute l'histoire de ce film n'est pas une succession d'événements providentiels ?
— Evidemment. La préparation et le tournage du film fourmillent d’événements qui ne semblent pas tous relever des lois ordinaires de la nature… Mel Gibson s’est expliqué là-dessus, Jim Caviezel (le comédien qui tient le rôle de Notre-Seigneur) aussi. C’est vrai que la foudre à frappé à deux reprises Jan Michelini, un Italien assistant de Gibson sur le tournage, qui n’a eu que quelques brûlures superficielles au bout des doigts. C’est vrai que la foudre a aussi frappé Caviezel et qu’on a vu de la fumée sortir de ses oreilles… Il en fut étourdi, mais sans plus. On a parlé d’une petite fille sourde et muette, dont les parents appartenaient à l’équipe technique du film, qui s’est subitement mise à entendre et à parler. On a encore évoqué un (ou plusieurs) cas de conversion pendant le tournage… Ce sont des faits. Tout cela n’est pas « ordinaire ». Mais il n’est guère « ordinaire » de tourner un film avec la présence quotidienne d’un prêtre sur le plateau. Ça ne l’est pas davantage que la Sainte Messe y soit célébrée tous les jours, que le réalisateur la serve tous les soirs, que l’acteur principal récite son chapelet avec son épouse entre chaque prise… Mel Gibson a déclaré : « C’est le Saint-Esprit qui a dirigé le film. Moi, je me suis contenté de “régler la circulation” ». Je crois discerner, dans tout cela, une forme de « prédestination » chez Gibson et, indubitablement, l’action du Saint-Esprit. Peut-être, après tout, que le vrai « miracle » c’est… le film ! Emporté par l’indignation, j’avais trouvé scandaleux qu’un homme, Mel Gibson, qui a fait gagner plus de 2,2 milliards de dollars à l’industrie cinématographique de Hollywood, n’ait pu trouver, parmi ces « grands studios » un cent de participation à la production financière de son film et pas davantage un distributeur ! En y réfléchissant, je me dis que tout cela pouvait bien être voulu par Dieu, afin qu’aucun cent de la pourriture de Hollywood ne vienne « souiller » ce film réalisé à Sa gloire, et que seul, celui qu’Il avait préparé et choisi pour le réaliser l’accomplisse.
– Mais qu’elles ont été les attitudes des professionnels de l’industrie cinématographique américaine ?
— Elle fut, au début, unanimement défavorable : les plus féroces considéraient Gibson comme fou (un film sur Jésus ! tourné en araméen et en latin ! avec des acteurs inconnus !) ; les plus « charitables » estimaient que ce film serait la fin de la carrière exceptionnelle de l’acteur et réalisateur. Mais, sitôt que certains professionnels eurent visionné un prémontage du film, la tendance commença à s’inverser. Je cite toujours ce cas représentatif de Jack Valenti, président de la Motion Picture Association of America (association de l’industrie du film, qui distribue notamment les Oscars) qui, après avoir assisté à une projection privée, et avoir pleuré comme tout le monde, s’interrogea devant des journalistes sur les raisons « de tout ce b… autour d’un film qui est un chef-d’œuvre ». Aujourd’hui, beaucoup de patrons des « grands studios » de Hollywood, se mordent les doigts : ils savent que ce film sera un triomphe financier ! Les lecteurs de Présent seront « amusés » d’apprendre que le film La Passion du Christ sortira aux Etats-Unis sur 2 000 écrans (nombre habituel pour un film « standard » de Hollywood) ce mercredi des Cendres, ce qui tient du prodige, et que, rappelons-le, un mois avant sa sortie officielle, au moins un million de billets ont été pré-vendus ! Cela ne s’est jamais vu.
– Les réactions des responsables catholiques sont... diverses. Avez-vous une explication ?
— S’agissant de l’épiscopat américain, les choses sont en effet compliquées. La conférence épiscopale des États-Unis s’était mise dans une position intenable, en suscitant (ou en autorisant ?) une de ses innombrables sous-commissions, composée d’hérétiques et de néo-modernisants alliés à des universitaires juifs désignés par l’ADL, à rédiger un « rapport » sur la base d’une ébauche ancienne de scénario du film. Scénario qui s’est révélé avoir été volé dans les locaux d’Icon Productions. Puis, paniquée par les menaces de poursuites judiciaires de l’avocat du réalisateur, en désavouant cette sous-commission et en présentant de plates excuses publiques à Mel Gibson. Depuis cet « incident », l’instance dirigeante de l’épiscopat américain s’en tient à un prudent mutisme. D’autres prélats américains n’ont pas ménagé leurs encouragements à Gibson, au premier rang desquels il convient de citer Mgr Charles Chaput, archevêque de Denver. Par contre, si l’on parle des associations catholiques américaines, alors là, c’est le soutien total et enthousiaste : de la Catholic League aux Knights of Columbus. Mais le monde chrétien, aux Etats-Unis, ne se compose pas que de catholiques, même si ces derniers constituent la plus grosse communauté (70 millions de fidèles). Les évangélistes (45 millions) sont pour le film, tout comme les baptistes du Sud (35 millions), et un nombre incalculable d’autres « dénominations ». Je dois aussi à la vérité de préciser que de nombreux juifs pratiquants, et fort célèbres aux Etats-Unis, soutiennent aussi par la parole et par l’écrit Mel Gibson, et, sans partager la foi en Jésus-Christ, n’ont rien vu d’antisémite ou de répréhensible dans le prémontage qu’ils ont visionné.
– Mais qu’en est-il de la véritable réaction du Saint-Père sur ce film, puisqu’une polémique a surgi sur l’authenticité de son propos ?
— J’ai beaucoup travaillé cette question. On en trouvera le détail dans le deuxième bulletin de l’association « Pro Passio ». C’est là une dernière (?) manœuvre des modernistes contre le film. Je puis vous garantir que le Pape a bien dit, après avoir visionné le film : « C’est comme c’était », signifiant par là que La Passion du Christ était conforme à la lettre et à l’esprit des Saints Évangiles.
– Pensez-vous qu'à sa sortie, le film sera entouré d'une hostilité militante ?
— Je ne le pense pas. Je le crains. Mel Gibson lui-même déclarait le 21 janvier dernier : « Je prévois que le pire est encore à venir. J’espère me tromper. J’espère me tromper. » Ce qui pourrait, d’ailleurs, susciter un mouvement encore plus large de défense du film et, partant, de l’honneur de Notre Seigneur. Le réalisateur faisait encore, ce même jour, à une assemblée de 400 pasteurs protestants, une remarque que nous pouvons faire nôtre : « Il y aura toujours des opposants [aux films sur les Évangiles], mais il faut tenir bon et leur rentrer dedans ! »
– A-t-on jamais dû avoir recours à une association pour « défendre » un film pas même sorti en salles ?
— Je l’ignore et je ne me suis pas même posé la question… Je travaille avec acharnement sur cette « affaire » depuis le mois de mai de l’an passé. J’ai écrit pas mal d’articles, parlé beaucoup du film sur Radio Courtoisie, expédié pas mal de lettres bien senties aux psittacidés de la presse dite « française », petits « maîtres » et grands ignorants, se recopiant (mal) les uns les autres… J’ai donc joué à l’homme-orchestre, solitaire, pendant des mois, jusqu’à ce qu’un certains nombre de journaux amis commencent à reprendre mes « papiers » ou à m’en demander, et à faire paraître les leurs propres. Le mouvement était lancé et l’intérêt de nombreux catholiques pour ce film s’éveillait. Il était donc temps de se rassembler dans une association pour défendre et promouvoir le film, ce que j’ai fait en novembre. Nous ne sommes aujourd’hui pas très loin du millier d’adhérents : c’est une formidable chaîne d’amitié et de prières. Depuis le mois de janvier de cette année, grâce à la sollicitation (et à l’aide…) de l’ami Jean-Baptiste Chaumeil, je donne des conférences partout où on me le demande : Paris, Versailles, Lille, Bordeaux, Brest… L’association prépare ainsi l’opinion à la réception du film et fournit des arguments, que dis-je ? des munitions pour la bataille qui s’annonce.
– Vous attendez-vous donc à une hostilité particulière en France ?
— Aucun doute là-dessus. Notre contexte national est certes très différent de celui des Etats-Unis. Le catholicisme, en général, et les catholiques, en particulier, y sont maltraités. C’est pire en France, car le catholicisme, chez nous, n’a pas encore su se doter d’une arme de lobbying comme l’est, par exemple, la Catholic League. Mais nous avons la même camarilla audiovisuelle odieusement anticatholique, nous avons toutes sortes de groupes de pression, de « sociétés de pensée » qui ne donnent pas dans le philo-catholicisme… Imaginez-vous un instant qu’ils vont placidement se contenter de compter les gens qui feront la queue pour aller voir le film ? Ne rêvons pas ! Ce film, comme le Seigneur à la gloire duquel il a été réalisé, est un « signe de contradiction ». L’Adversaire n’en voulait pas, d’où les difficultés sans nombre, d’ordre spirituel ou matériel, que Mel Gibson a dû affronter et surmonter. A présent le succès (et même le triomphe, n’ayons pas peur des mots) se dessine aux Etats-Unis. L’Adversaire a sans doute perdu une bataille, mais il va continuer la guerre. Aux Etats-Unis, certes, mais aussi en France qui, malgré son avilissement présent, demeure à tout jamais la « fille aînée de l’Eglise », le pays de la révélation du Sacré-Cœur au monde. L’Adversaire hait tout cela, et hait le « petit reste », que le film de Mel Gibson, entre autres, va permettre de rassembler pour ce combat qui s’annonce. Et là, ce ne sera pas que du « cinéma » !
Propos recueillis par Jeanne Smits et Jean-Baptiste Chaumeil

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