Paroisse catholique
Saint Michel
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Semaine du 15 au 21 novembre 2004 Vingt cinquième Dimanche après la Pentecôte |
Nous porterons notre attention en cet ultime dimanche de l’année liturgique sur le fameux passage de l’ Epître de Saint Paul aux Corinthiens, le chapitre I, les versets 9 à 14. Voici le texte. Vous remarquerez qu’il n’est composé que d’une seule phrase. « Frères, nous ne cessons pas de prier pour vous, de demander que vous ayez en plénitude la connaissance de la volonté de Dieu, en toute sagesse et intelligence spirituelle ; que vous marchiez d’une manière digne du Seigneur et qui lui plaise en toutes choses, portant du fruit par toutes sortes de bonnes œuvres, croissant dans la connaissance de Dieu ; que pleinement fortifiés par la puissance de sa gloire, vous parveniez à une parfaite patience et endurance, rendant grâce avec joie au Père ; lui qui nous a rendus capables de partager le sort des saints dans la lumière ; lui qui nous a arrachés et nous a fait passer dans le Royaume de son fils bien-aimé, en qui nous avons la rédemption par son sang, la rémission de nos péchés » (Col 1 9-14). Voilà cette phrase fameuse qu’il faut connaître par cœur. Une seule phrase, d’une richesse merveilleuse, d’une densité extraordinaire. Voilà cette phrase que je voudrais faire « résonner », que je voudrais faire comme « chanter » à vos oreilles pour vous en faciliter la mémorisation. Elle nous révèle la prière de Saint Paul pour les Collosiens. Elle exprime l’objet de la prière de Saint Paul. Il prie pour ses fidèles : « Nous ne cessons pas de prier pour vous ». « Non cessamus pro vobis orantes ». Sa prière est incessante pour les Collosiens qu’il a engendrés à la vie divine. « Non cessamus » : Le dictionnaire latin « Bornec » dit que « cessare » veut dire rarement « cesser ». Il vaut mieux traduire ce mot par « hésiter », « différer », « tarder ». Donc il faut dire : il n’hésite pas à prier pour… Il ne diffère pas sa prière pour… C’est sa préoccupation première. C’est l’attitude vraie du pasteur. Il ne tarde pas à accomplir ce devoir. Il ne fait pas passer avant d’autres préoccupations. Mais « cessare » a encore un autre sens qu’on ne peut passer sous silence. Il veut dire aussi « agir mollement », « rester inactif », « s’interrompre ». Il y a une négation : « non cessamus ». Il faut donc traduire : « Nous n’agissons pas mollement ». « Nous n’accomplissons pas ce devoir mollement ». Il est donc particulièrement actif. Il vibre dans sa prière pour les collosiens. Tout cela pour dire que sa prière est fervente, constante, fréquente. Il ne s’arrête pas de prier. Il n’a pas de repos dans sa prière. On voit donc une âme ardente, constante, même fébrile. Cette ardeur de l’âme de Saint Paul me plaît. Telle est, vous dis-je, la prière de Saint Paul pour ses fidèles de Colosse. Et quel est l’objet de sa prière. Mieux quels sont les objets de sa prière ? « Nous ne cessons pas …de
demander que vous ayez en plénitude la connaissance de la volonté
de Dieu… » « Postulantes… » de « postulare » qui veut dire : « demander », mais avec instance, « réclamer ». Donc Saint Paul demande avec instance et persévérance, à Dieu. Quoi ? « Ut impleamini… » « Implere » veut dire « combler », « être plein de.. ». Donc Saint Paul demande à Dieu que ses fidèles aient une pleine connaissance de la volonté de Dieu. Mais attention ! Comprenons bien le sens de « implere ». Il a une signification de plénitude. De là, vient le mot « plenus » qui ne veut pas seulement dire « plein ». Mais qui veut dire aussi « replet, corpulent, bien fourni, abondamment garni de , riche, rassasié, complet, entier, parfait, même fort ». Donc le verbe latin « implere » connote un sens de réelle plénitude. Que vous ayez une pleine connaissance, bien tassée, une bonne mesure… Que vous soyez riches de la connaissance de la volonté de Dieu. Mais il y a plus encore. « Implere » veut dire aussi « exécuter, réaliser ». La connaissance que Saint Paul souhaite pour les collossiens, est une connaissance « active », qui ne reste pas au seul niveau « cognitif » mais qui agit, qui meut la volonté afin que la volonté divine soit non seulement connue mais réalisée. « C’est le sens de la prière du Notre Père : « Que votre volonté soit faite ». Mais quelle est donc cette volonté divine sur les chrétiens de Colosse. Saint Paul en parle en différents endroits de ses lettres. Faisons court. Il en parle en particulier dans sa première épître aux Théssalonissiens. Il écrit « haec est enim voluntas Dei, sanctificatio vesta » ou encore « Gratias agite. Haec est enim voluntas Dei ». Saint Pierre y fait allusion aussi dans sa première épître : « Sic est voluntas Dei ut bene facientes… ». « C’est la volonté de Dieu que, en faisant le bien, vous fermiez la bouche aux insensés qui vous méconnaissent ». Il dira aussi que la volonté de Dieu, c’est qu’aucun de vous ne se perde », « et pereat unus » Poursuivons ! « Que vous marchiez d’une manière dignes de Dieu » « ut ambuletis digne Deo ». Ce « ut » confirme bien notre analyse précédente : « Que nous ayons une connaissance qui agisse ». « Ut ambuletis ». Voilà
une belle définition du chrétien. Le chrétien est
celui qui marche « dignement » devant Dieu. « Digne
» veut dire « dignement ». Certes ! mais aussi «
avec beauté, noblesse, élégance ». Cela vaut
non seulement pour l’âme, mais aussi pour le corps et la
tenue corporelle, pour le maintien et pour l’habillement. Et ainsi, et ainsi seulement, nous pourrons plaire à Dieu : « per omnia placentes ». « Placentes » de « placere » qui veut dire « être trouvé bon ». Saint Pierre, lui, parle, nopus l’avons vu plus haut de « bene facientes ». Saint Paul poursuit sa description. C’est toujours la même phrase. C’est dire que Saint Paul a du « souffle ». Le Père Spicq dirait du « pneuma ». Il est une âme de feu. « In omni opere bono fructificantes ». « Portant du fruit par toutes sortes de bonnes œuvres ». Là encore, pour Saint Paul, le chrétien est celui qui « agit », qui pose des actes bons. Le chrétien est ici comparé à un arbre qui porte de bons fruits. « Et crescentes in scientia Dei » « grandissant dans la connaissance de Dieu » « Crescere » veut dire : « croître, augmenter, grandir, s’élever ». Vraiment Saint Paul a une vue « dynamique » du chrétien. Voyez la répétition des verbes : « crescentes », « fructificantes », « placentes », « ut ambuletis ». Il n’y a pas de paresseux dans la maison du Père. C’est Saint Jean Chrysostome qui dit cela dans son beau commentaire d’Abraham au chêne de « Mambré » accueillant en sa demeure les trois « visiteurs ». « In omni virtute confortati secundum
potentiam claritatis », « que, pleinement fortifiés
par la connaissance de sa gloire » Et ainsi Saint Paul prie pour que ,
forts, nous manifestions de la patience, « in omni patientia ».
La Patience qui est, nous enseigne Saint Thomas, précisément
une partie potentielle de la vertu de force. « Cum gaudio », avec joie. C’est encore une autre caractéristique du chrétien. Il n’est pas seulement, fort, patient, longanime. Mais aussi « joyeux ». Saint Paul y insiste énormément. Il n’est pas rare de trouver sous sa plume les expressions « Iterum dico gaudete semper ». « Gratias agentes Deo Patri » : « rendant grâce à Dieu ». Voilà encore une note tout à fait paulinienne. ? Mais pourquoi cette action de grâce
? Parce que Dieu nous a rendu capable, digne, « dignos nos fecit
» d’être avec les Saints dans la lumière. C’est
la vie éternelle. Et « transtulit in regnum Filii dilectionis suae » « Lui qui nous a arrachés à la puissance des ténèbres et nous a fait passer dans le Royaume de son Fils » « et transtulit in regnum Filii dilectionis suae » C’est merveilleux. Le chrétien est celui qui vient de la Puissance des ténèbres au Royaume de la lumière. Il est celui qui passe d’une puissance à une autre, du diable à Dieu. Le diable est dépossédé de sa proie. Le chrétien est celui qui est devenu, par pure miséricorde, l’ « être » de Dieu, le « bien » de Dieu, la « propriété de Dieu », sa « chose ». Et le moyen de ce passage, de cette libération, de ce séjour dans « le royaume de la dilection » fut la Croix de NSJC : « en qui nous avons la rédemption par son sang, la rémission de nos péchés ». Voilà l’objet de l’action de grâce du chrétien. N’oublions jamais que la rédemption est une libération, une dés-appropriation, une appropriation. Un passage des ténèbres à la lumière. Comment ne pas rendre grâce à Dieu d’avoir accompli une telle œuvre, virile, forte – jusqu’au versement du sang - la Croix - l’œuvre des œuvres.
Et sous ce rapport, la messe dominicale
est une « bien belle chose » qu’il faut coûte
que coûte garder puisqu’il ne reste souvent plus que cela
pour continuer d’entendre la parole de Dieu. Pour certains, ce
n’est peut-être plus qu’un petit filet d’eau.
Peu importe ! Ce petit filet d’eau peut être encore capable
de désaltérer même l’âme en pleine tourmente,
seule au milieu de l’agitation du monde . Imprudent celui ou Imprudente
celle qui arrête de s’abreuver à ce dernier petit
filet…d’eau… de vie…de vie divine. Aussi un
grand merci au cardinal Arinze de rappeler cette chose dans sa récente
intervention que vous pourrez lire à la suite de cette homélie.
Pour en connaître le teneur, cliquez ici
Nous étudions aujourd’hui l’article 5 de la question 73 de la III pars de la Somme de Saint Thomas. Pour les nouveaux, je vais rapidement dire comment il faut citer la Somme et donner les références pour se retrouver dans cette volumineuse étude. La Somme de Saint Thomas, certainement un chef d’œuvre, est constituée de différentes parties : trois partie. Chacune de ces parties est constituée de questions. Chacune de ces questions contient un certain nombres d’articles. Il faut savoir aussi que les articles de la Somme sont composés tous de la même manière : après le titre, donné toujours sous forme d’interrogation, apparaissent les objections. Il y en a toujours un certain nombre. Ensuite, arrive le « sed contra ». c’est généralement la thèse exposée. Suit alors le « corps de l’article » qui contient les explications théologiques de la thèse catholique. Puis viennent ls réponses aux objections. On les retrouve en disant : « ad primum », « ad secundum ». Voilà aussi la bonne manière
de donner une référence dans la Somme. A propos de cet
article 5 sur le sacrement de l’Eucharistie, on aura : «
III 73 5 ad primum… ». On commence par donner la partie
de la Somme, la question, puis l’article, enfin la réponse
à l’objection. Quel est donc l’objet de l’article étudiée aujourd’hui : « Utrum fuerit conveniens institutio istius sacramenti ? » Il s’agit de l’institution de l’Eucharistie. Saint Thomas se demande si le moment - la Cène - a été bien choisi. On sait, par le Nouveau Testament, que
la Sainte Eucharistie a été instituée par Notre
Seigneur Jésus-Chist, lors de la dernière Cène,
à la veille de sa Passion. Je trouve cela dans le Catéchisme
du Concile de Trente, à la page 204 (édition Itinéraires).
Je trouve ce paragraphe remarquable. Il nous dit le temps de ‘l’institution
de l’Eucharistie : lors de la dernière Cène, après
la manducation de l’agneau pascal. Il nous donne également
la raison de cette institution de l’Eucharistie : « un gage
de son amour pour ses disciples et pour nous, mais aussi pour être
toujours avec les siens. Il élève enfin notre attention
en nous faisant considérer ce sacrement de l’Eucharistie
dans toute « l’économie du salut » : «
voulant mettre la vérité à la place des figures
et la réalité à la place de l’ombre »….
C’est dire pareillement que dans l’Ancien Testament, des
figures annonçaient ce sacrement. Elles en étaient l’annonce,
le signe précurseur. L’agneau pascal, ici expressément
invoqué, ne serait pas le moindre des figures. Il fera, du reste,
l’objet du très important article 6. Voyons cela. Il s’agit ici d’étudier le moment où ce sacrement a été institué. Nous laissons de côté l’étude des particularités qui ont entouré cette institution, comme, par exemple la qualité du pain utilisée par NSJC, comme les paroles utilisées par NSJC. Elles seront étudiées à leur place dans le cours de la question. La Cène a-t-elle été le bon moment choisi par le Seigneur ? Il faut répondre par l’affirmative puisque Notre seigneur, qui a institué l’Eucharistie, fait tout avec sagesse. C’est l’argument du « sed contra » : « Hoc sacramentum institutum est a Christo de qua dicitur Mt 7 17 : Bene omnia fecit ». Ce sacrement a été institué par le Christ qui, selon l’Evangile de Mathieu 7 17 fait tout bien. Donc le temps de cette institution est bien choisi. Dans le corps de l’article, Saint Thomas va apporter trois belles raisons qui, m’eest avis, ont inspirées la rédaction du catéchisme de Trente, dit Catéchisme Romain. Voyons cela Il déclare tout d’abord
que ce sacrement fut institué, « d’une manière
convenable » -convenienter – à la dernière
Cène alors que le Christ se trouvait pour la dernière
fois « ultimo » dans l’intimité de ses disciples.
« Cum discipulis suis fuit conversatus ». « Conversatus
» de « conversari », qui ne veut pas dire »
converser », mais « vivre avec », « fréquenter
assidûment ». Première Raison : « En raison de ce que ce sacrement contient », « ratione continentiae huius sacramenti ». C’est qu’en effet «
le Christ lui même est contenu dans l’Eucharistie comme
dans un sacrement ». « Continetur enim ipse Christus sicut
in sacramento ». Ce sacrement ne contient pas seulement la vertu
du Christ comme dans le sacrement de baptême, par exemple, -la
grâce sanctifiante - mais il contient le Christ lui-même.
Notre Seigneur se trouve dans le sacrement de l’Eucharistie, dans
sa réalité substantielle bien que caché sous les
espèces eucharistiques. C’est pour ce motif, c’est
la raison pour laquelle il se laissa ainsi, Lui-même, de cette
manière, dans ce sacrement, substantiellement présent,
alors que les circonstances de sa passion allaient l’arracher
physiquement aux yeux de ses disciples. « Quando ispe Christus
in propria specie a discipulis discessurus erat… » «
Discessurus » de « disceder » qui veut dire «
s’éloigner, partir, sortir de , passer, disparaître
». Ils pourront ainsi, malgré son absence physique, une
fois parti, l’ »avoir encore » et « vénérer
» sa présence sous mode sacramentel. Un peu comme en l’absence
de l’Empereur, on donne son « image » à vénérer
». cette présence réelle est donc bien une manifestation
de son amour pour ses disciples. Ne dit-on pas que l’amour exige
la présence. C’est ce que disent les auteurs du Catéchisme
Romain : « L’Eucharistie est ainsi « un gage tout
à fait divin et admirable de son amour pour ses disciples qu’Il
quitte, « passant de ce monde à son Père ».
Et Saint Thomas, qui a une mémoire extraordinaire, cite Eusèbe
: « Le Corps que le Christ avait pris allait être enlevé
à nos yeux et porté dans les astres. A cause de cela,
il était nécessaire qu’au jour de la Cène,
le Christ consacrât pour nous le sacrement de son corps et de
son sang, afin que fut honoré toujours dans le mystère
ce qui était offert comme prix » de notre salut. Deuxième raison du choix de ce moment pour l’institution de l’Eucharistie : « elle consiste en ce que, sans la foi en la Passion du Christ, jamais, depuis le péché originel, le salut n’a été possible » ; « Secundo quia sine fide passionis Christi numquam potuit esse salus ». Saint Thomas fonde cette affirmation de la nécessité de la foi en la passiondu Christ comme moyen universel de salut sur l’enseignement de Saint Paul aux Romains : « Celui que Dieu a proposé comme propitiation par la foi en son sang » (Rm 3 25) S’il en est ainsi, on comprend qu’il y eut en tout temps, « in omni tempore », dans l’Ancien comme dans le Nouveau Testament, comme le dit Saint Thomas, « parmi les hommes quelque représentation de la Passion du Christ », « Et ideo oportet omni tempore apud homines esse aliquod repraesentativum Dominicae passionis ». « Quelque chose, quelque représentation, quelque signe relatif à la passion du Christ, quelque symbole qui nourrisse, entretienne, suscite la foi, la provoque, en quelque sorte, fut toujoiurs nécessaire dans le cours du temps ». Ainsi dans l’Ancien Testament,
le sacrement principal -Saint Thomas utilise bien le mot « sacramebtum
praecipuum » - c’est-à-dire, ici dans le conteste,
le « aliquod repraesentativum Dominicae passionis » - fut,
vous le savez sans doute, l’ «agneau pascal ». Eh bien, à l’agneau pascal de l’Ancien Testament, a succédé, dans le Nouveau Testament, le sacrement de l’Eucharistie, qui est le « aliquod repraersentativum Dominic passionis » enfin accomplie, enfin vraiment réalisée ; qui est le sacrement praecipuum » de la passion du Christ réalisée, dans le Nouveau Testament. Saint Thomas écrit très exactement : « Successit autem ei in Novo Testamentum sacramentum, quod est rememorativum praeteritae passionis ». C’est pourquoi il convenait qu’au moment où la passion du Christ était éminente, juste après la célébration du premier sacrement (i .e. après la manducation de l’agneau pascal) le nouveau signe, le nouveau sacrement i.e. se sacrement de l’Eucharistie, fut institué. L’argument est vraiment probant. Important. Je retiendrai particulièrement ces expressions par lesquelles Saint Thomas désigne par deux fois le sacrement de l’Eucharistie. La première fois, il parle de « aliquod repraesentativum Dominiae passionis », la deuxième fois, il dit : « In Novo Testamento Eucharistiae sacramentum, quod est rememrotivum praeteritae passionis ». Et j’en conclurai que l’Eucharistie est vraiment inséparable de la Passion du Christ. Elle en est même le signe « représentant », le signe « remémorant » la passion du Christ. C’est ce que je vois implicitement enseigné par les auteurs du Catéchisme Romain écrivant sur le sujet de l’institution de l’Eucharistie et de la bonne convenance du temps de cette institution, ces belles paroles : « Après avoir célébré la Pâque en mangeant l’agneau pascal avec ses disciples, coulant enfin mettre la vérité à la place des figures et la réalité à la place de l’ombre, « il prit du pain etc… »Invoquant l’agneau pascal, signe ancien de la passion du Christ, Ils insistent eux aussi, de cette manière, sur la relation entre le sacrement de l’Eucharistie et la Passion du Christ. L’Eucharistie en est le « sacramentum praecipuum », le « aliquod repraesentitivum Domicae passionis. On peut dire, dès lors, que toute la théologie de l’Eucharistie se trouve comme merveilleusement exprimée dans l’institution même de ce sacrement. La signification de ce sacrement se trouve contenue absolument dans son institution même. C’est du reste bien normal. Il y a une belle cohérence dans le mystère du Christ. Je comprends pourquoi et comment l’Evangéliste ait pu dire : « Bene omnia fecit » (Mt 7 17) La troisième raison de la belle convenance de l’institution de l’Eucharistie, lors de la dernière Cène. Elle est particulièrement suave. Elle nous ramène, là encore, à la Cène, à l’intimité particulière qui dut régner en cet instant des ultimes adieux. Toutes les paroles, que le Maître va prononcer, vont être reçues avec une particulièrement émotion, attention. Elles resteront définitivement gravées dans la mémoire et le cœur de ses amis. C’est comme un testament qu’ils reçoivent. Ce sont ses « ultima verba ». Le moment ne pouvait être mieux choisi pour leur donner ce sacrement, signe de son plus grand amour, trésor le plus sublime. On revoit ici l’enseignement retenu par les auteurs du catéchisme Romain. Voilà comment Saint Thomas s’exprime : Il fait remarquer que « les paroles dites à la dernière heure, surtout par les amis qui s’en vont, restent davantage dans le souvenir ; car, à ce moment, le cœur est plus brûlant pour les amis, et ce que nous aimons davantage s’imprime plus profondément dans l’esprit. Or, comme le dit le pape saint Alexandre, il ne peut rien se trouver dans les sacrifices, de plus grand que le corps et le sang du Christ ni aucune oblation ne peut être plus excellente que celle-là. Il fallait donc que ce sacrifice fût en une grande vénération ; et pour cela, le Seigneur institua ce sacrement, quand, pour la dernière fois, Il se sépara de ses disciples. Saint Augustin en fait la remarque dans son livre des Réponses Janvier où il dit : « Le sauveur, pour mieux accuser la profondeur de ce mystère, voulut le fixer en dernier lieu dans le cœur et dans la mémoire des disciples, au moment il les quittait pour aller à sa Passion ». Il fallait que la solennité du moment répondit à la grandeur du don. Et voilà pourquoi le Christ réserva pour sa dernière entrevue avec les siens avant de mourir le témoignage dernier et suprême de son amour pour eux » La doctrine donnée dans cet article
sur le sacrement de l’Eucharistie est particulièrement
précieuse. Elle situe l’Eucharistie dans sa relation à
la Passion du Christ et elle est, me semble-t-il, parfaitement résumé
dans cette phrase de Saint Thomas, dans le « ad secundum »
: « Eucharistia est sacramentum perfectum Domicae passionis, tamquam
continens ipsum Christum passum ». Je crois que l’on peut
difficilement avoir une plus belle synthèse. Remarque importante. En effet cette lecture de l’article
5 de la Somme de Saint Thomas me fait aussi réfléchir
sur certaines affirmations que Jean-Paul II utilise dans son Encyclique
« Ecclessia de Eucharistia ». Saint Thomas, pour sa part, dit simplement : « Eucharistia est sacramentum perfectum Dominicae passionis, tamquam continens ipsum Christum passum ». Il ne dit pas : « …mais aussi le mystère de la résurrection dans lequel le sacrifice trouve son couronnement ». Cette simple remarque ne rendrait-elle pas digne d’attention la réflexion de « Canonicus » dans le « Courrier de Rome » d’octobre 2004, écrivant sur ce sujet : « Ce qui est très clair, c’est que la hiérarchie actuelle préfère orienter les fidèles vers la contemplation du « gaudio » de la Résurrection plutôt que vers l’acceptation de l’ignominie de la Croix, scandale pour les Juifs et folie pour les païens : « gardons les yeux fixés sur Jésus, l’auteur et le consommateur de la foi, qui en vue de la joie qui lui était offerte, a souffert la croix sans égard à la honte, et s’est assis à la droite du trône de Dieu » (Hb 12 2) (CR Oct. 2004 p. 4, 3 col) De plus, à cette même lumière de l’enseignement de l’Aquinate en son article 5, je comprends cette fois clairement les réflexions de certains de mes « confrères » écrivant leur livre : « Le Problème de la réforme liturgique ». La messe de Vatican II et de Paul VI, Etude théologique et liturgique ». Je comprends parfaitement les réflexions suivantes de « Canonicus », toujours dans le même numéro du Courrier de Rome, critiquant les formulations du « Nouveau Catéchisme » de l’Eglise Catholique sur la Messe. Il écrit : « Le Nouveau catéchisme maintient pleinement la nouvelle conception de la Messe, apparue avec Vatican II et le Novus Ordo Missae, conception qui constitue un déplacement du « centre de gravité » de la messe : pour le missel traditionnel, « la messe est offrande sacrificielle de la présence transsubstantiée » (NB C’est tout à fait la conception exprimée par Saint Thomas. Voyez le « ad secundum ») ; pour le nouveau missel, la Messe est « le mémorial de la Pâque du Christ », qui comprend, en tant que « banquet pascal », autant le mystère de la passion que celui de la résurrection ». (NB Saint Thomas ne dit pas cela lorsqu’il parle de l’agneau pascal ». Votez les expressions utilisées dans la deuxième raison du corps de l’article 5. Il parle, là aussi : « aliquod repraesentativum Domincae passionis », « rememorativum praeteritae passionis ». Il ne parle aucunement du « banquet pascal ». Il ne dit pas que le sacrifice eucharistique est « autant le mystère de la passion que celui e la résurrection ». Il dit simplement que l’Eucharistie est « rememorativum praeteritae passionis ». Il dit encore « : « Eucharistia est sacramentum perfectum Dominicae passionis, tamquam continens ipsum Christum passum ». Ah comme sont importantes ces premières notions du traité de Saint Thomas sur l’Eucharistie). Cette nouvelle conception, tout en conservant formellement la notion de la présence réelle selon le dogme de la Transsubstantiation de la substance du pain et du vin en Corps et Sang du Seigneur, la trouble néanmoins par la notion nouvelle et peu claire de l’œuvre « rendue présente » par l’action liturgique. En effet cette dernière d’après le Nouveau Catéchisme, « rend présente » toute « l’œuvre du salut accomplie au moyen de la vie, de la mort et de la Résurrection du Christ ». Mais, sans parler de la « vie » comment est-il possible de « rendre présente » dans la Messe la mort du Christ et sa Résurrection de la même façon ? Puisque le texte ne le précise pas, il faut dire : « de la même façon ». La Résurrection rendue présente dans le rite de la messe, l’est-elle de la même façon que le Corps et le Sang du Christ dans l’Hostie consacrée ? Répondre oui reviendrait à une affirmation dépourvue de sens. Et alors ? On reste dans l’obscurité entre autres parce que de cette nouvelle formulation, il résulterait que l’un des buts fondamentaux de la Messe est celui de rendre présente la Résurrection, sans exclure évidemment l’Ascension ; de rendre présente en somme, la Gloire du Kyrios, ce qui est tout aussi dépourvue de sens. Mais qu’y-t-il derrière cette obscurité. Il faudrait tenter de le comprendre ». (CR oct 2004 p4) Si vous avez fait attention à la présentation de la pensée de saint Thomas faite plus haut, vous devez comprendre la particulière clairvoyance de ce « Canonicaus ». J’aimerais bien le connaître. Ceci pour vous dire encore l’importance des définitions. Sans elles, on peut se tromper. |