Paroisse catholique Saint Michel

Dirigée par

 Monsieur l'abbé Paul Aulagnier

 

06 80 71 71 01

 

Semaine du 6 au 12 décembre 2004

troisiéme dimanche de l’Avent.

 

 

I - Les textes de la messe.

 

Introït tiré de Philippiens 4 4-6

« Réjouissiez-vous sans cesse dans le Seigneur. Je le répète : réjouissez-vous. Que votre aménité soit connue de tous les hommes. Le Seigneur est proche. N’entretenez aucun souci ; mais en toutes circonstance, par la prière, présentez à Dieu vos demandes. V/ Seigneur, tu t’es montré bon pour la terre, tu as ramené les captifs de Jacob V/ Gloire au Père. »

La collecte

« Prêtez Seigneur, une oreille attentive à nos prières, et que votre présence vienne pénétrer de clarté la nuit de notre cœur. Vous qui, étant Dieu, vivez et régnez ».

Epître de saint Paul aux Philippiens 4 4-7)

« Frères, soyez toujours joyeux dans le Seigneur ; je le répète : soyez joyeux. Que votre aménité soit remarquée de tous les hommes. Le Seigneur est proche. Ne soyez inquiets de rien ; mais qu’en toute chose, par la prière et la supplication, avec des actions de grâce, vos demandes soient portées à la connaissance de Dieu. Et la paix de Dieu, qui dépasse tout ce qu’on peut concevoir, gardera vos cœurs et vos pensées dans le Christ Jésus Notre Seigneur. »

Graduel (Ps 79 é-3)

« Toi, Seigneur, qui trônes sur les chérubins, réveille ta puissance et viens V/ Prête l’oreille, pasteur d’Israël, toi qui conduis Joseph comme un troupeau ».

Alleluia (Ps 79 3)

Alleluia, Alleluia v/ Réveille ta puissance, ô Seigneur, et viens nous sauver ! Alleluia.

Evangile selon Saint Jean 1 19-28

En ce temps-là, les Juifs envoyèrent de Jérusalem des prêtres et des lévites auprès de Jean pour lui demander : « Qui es-tu ? » Il reconnut, il ne nia pas, il reconnut : « Je ne suis pas le Messie ». Et ils lui demandèrent : « Alors ? Es-tu Elie ? » Il dit : « Je ne le suis pas. » « Es-tu le prophète ? » Il répondit : « Non ». Ils lui dirent alors : « Qui es-tu ? que nous donnions réponse à ceux qui nous ont envoyés. Que dis-tu de toi ? » Il dit : « je suis la voix de celui qui crie dans le désert : « Redressez le chemin du seigneur, comme a dit le prophète Isaïe ». Et parmi les envoyés, il y avait des pharisiens. Ils l’interrogèrent et lui dirent : « Alors pourquoi baptises-tu, si tu n’es ni le Messie, ni Elie, ni le prophète ? » Jean leur répondit : « Moi, je baptise dans l’eau ; mais au milieu de vous, quelqu’un est là, que vous ne connaissez pas. Lui qui vient derrière moi, il a passé avant moi et je ne suis pas digne de dénouer la courroie de sa sandale. » Cela est arrivé à Béthanie, au-delà du Jourdain, où Jean baptisait. »

Offertoire (Ps 84 2-3)

Tu t ‘es montré bon pour la terre, ô Seigneur, tu as ramené les captifs de jacob, tu as ôté l’iniquité de ton peuple. »

Secrète

« Que sans cesse vous soit offert, Seigneur, le sacrifice de notre religion, accomplissant ainsi l’institution sacrée et tout ensemble opérant en nous la merveille de votre salut ».

Communion (Is 35 4)

Dites aux timides : courage, ne craignez pas ; voici notre Dieu qui vient nous sauver ».

Post-Communion

« Nous implorons, Seigneur, votre bonté, pour que ces secours divins nous arrachent à nos désordres et nous préparent aux fêtes qui viennent »

 


II - Homélie.

 

Nous commenterons ce dimanche le texte de l’Evangile et nous porterons notre attention sur la belle figure de Saint Jean-Baptiste, le précurseur. Le précurseur du Seigneur-Jésus, notre Sauveur. Il en est l’objet principal. J’aime beaucoup cet illustre personnage de notre religion.

Saint Jean, l’Evangéliste, dans le prologue de son Evangile, le présente merveilleusement. Avec grandeur et panache.

« Un homme parut, il était envoyé de Dieu, son nom était Jean. Il vint en témoignage pour rendre témoignage à la Lumière, afin que tous crussent par lui. Il n’était pas la lumière, mais il devait rendre témoignage à la Lumière ».

Voilà la mission de Saint Jean Baptiste : rendre témoignage à la Lumière. Voilà sa fonction, son rôle, sa raison d’être. Il faudrait dire sa « haute mission. Sa noble mission. Et donc sa grandeur personnelle.

Il ne pouvait y avoir de plus noble et haute mission que de montrer, de son doigt, au genre humain, la Lumière.
Il a mené et accompli sa mission avec fidélité, dans la vérité, dans l’humilité, dans une parfaite docilité aux inspirations divines.

Mais pourquoi rendre témoignage à la Lumière ? Pourquoi témoigner de la Lumière ? A-t-elle besoin d’être montrée pour être vue ? La lumière est la Lumière et , de par sa nature, la lumière est vue par elle-même. C’est, du reste, elle-même qui éclaire toute chose « venant en ce monde ». Rien n’est vu, n’est montrable sans la lumière. Tout est vu, tout est montrable, au contraire, par la lumière, grâce à la lumière.

Pourquoi donc fallait-il que Saint Jean-Baptiste montre la lumière, rende témoignage à la lumière ? Chose unique, étonnante, n’est-ce pas !

Parce que cette lumière, - dit Saint Jean, l’Apôtre - , cette lumière - qui a la caractéristique de briller dans les ténèbres, comme toute lumière : « Et la lumière brille dans les ténèbres » - , les « ténèbres ne l’ont pas reçue ». Elles ne l’ont pas reçue. Parce que la Lumière était trop lumineuse, trop intense, comme le soleil, dont la lumière est trop intense à notre regard. Ainsi c’est notre regard qui manqua à la lumière… Il lui fallut un témoin…Un témoignage…Celui du Précurseur, de saint Jean-Baptiste.

Et , de fait, Lui, la Lumière, Lui, le Verbe, Lui, la Vie, ne fut pas reçu, ni connu, ni reconnu, lors de la Nativité à Bethléem. Ni les hôteliers, ni les amis, ni les familles de Notre Dame et de Saint Joseph ne reçurent le Verbe de Vie.

« Il était dans le monde et le monde a été fait par lui et le monde ne l’a point connu ». Ils ont gardé captive, en leur cœur, la vérité. Ce monde est resté dans les ténèbres. Il a préféré les ténèbres à la lumière. .

« Il est venu dans son héritage et les siens ne l’ont pas reçu ».

« Mais à tous ceux qui l’ont reçu, à ceux qui croient en son nom, à tous ceux qui le reçoivent comme Dieu, comme Créateur, comme Sauveur et Rédempteur, c’est-à-dire, à tous ceux qui croient en son nom et son nom - Jésus - définit sa mission, il est le Sauveur, le Rédempteur - il a donné le pouvoir de devenir enfants de Dieu, « nés de Dieu ». Voilà la source de la joie chrétienne.

Voilà le vrai rôle de Saint Jean Baptiste : témoigner de la divinité de l’enfant de Marie, témoigner de la « messianité » du « Fils de David », témoigner de son rôle de Rédempteur. « Voilà l’Agneau de Dieu qui efface le péché du monde ». Voilà ce qu’il doit dire. C’est son enseignement. Son témoignage.

Et, dans le milieu de Saint Jean Baptiste, dans la famille même de Zacharie, c’est la divinité de NSJC qui est proclamée. C’est sa mission rédemptrice qui est proclamée qui est crue

Voilà, en effet, le beau témoignage porté par Jean le Baptiste, par sa mère Elisabeth, cousine germaine de Notre Dame, par son père Zacharie.

Dans ce saint sanctuaire familial, dans les affirmations des uns et des autres, du père, de la mère et du fils, voilà ce qui est cru, voilà ce qui est dit, voilà ce qui est aimé, voilà ce dont on témoigne et Jean, leur fils, tout particulièrement.

Rappelons-nous les Ecritures. Elles nous enseignent tout cela.

Souvenez-vous de la conception miraculeuse de Jean Baptiste. Il est le fils de Zacharie et d’Elisabeth. « Aux jours d’Hérode, roi de Judée, il y avait un prêtre nommé Zacharie, de la classe d’Abia ; et sa femme qui était une des filles d’Aaron, s’appelait Elisabeth. Tous deux étaient justes devant Dieu, marchant dans tous les commandements et ordonnances du Seigneur, d’une manière irréprochable. Ils n’avaient pas d’enfant, parce qu’Elisabeth était stérile, et ils étaient l’un et l’autre avancés en âge.
Or, pendant que Zacharie s’acquittait devant Dieu des fonctions sacerdotales dans l’ordre de sa classe, il fut désigné par le sort, selon la coutume observée entre les prêtres, pour entrer dans le sanctuaire du Seigneur et offrir l’encens. Et toute la multitude du peuple était dehors en prières à l’heure de l’encens. Et un ange du Seigneur lui apparut, debout à droite de l’autel de l’encens. Zacharie, en le voyant, fut troublé, et la crainte le saisit. Mais l’ange lui dit : « Ne crains point, Zacharie, car ta prière a été exaucée ; ta femme Elisabeth te donnera un fils que tu appelleras Jean » (Lc 1 5-13)

Marie, Notre Dame, ayant appris, lors de l’Annonciation, que sa cousine Elisabeth était enceinte, en hâte « festinans », se précipita « aux pays des montagnes, en une ville de Juda » et entrant dans la maison de Zacharie, salua Elisabeth qui fit alors sa merveilleuse profession de foi en la divinité de l’enfant de Marie, la « Mère de Dieu ».

« En ces jours-là, Marie se levant, s’en alla en hâte au pays de montagnes, en une ville de Juda. Et elle entra dans la maison de Zacharie et salua Elisabeth. Dès qu’Elisabeth eut entendu la salutation de Marie, son enfant tressaillit dans son sein, et elle fut remplie du Saint-Esprit. Et élevant la voix, elle s’écria : « Vous êtes bénie entres les femmes, et le fruit de vos entrailles est béni. Et d’où me vient cet honneur que la mère de mon Seigneur vienne à moi ? Car votre voix, lorsque vous m’avez saluée, n’a pas plus tôt frappé mon oreille, que mon enfant a tressailli de joie dans mon sein. Heureuse celle qui a cru à l’accomplissement des choses qui lui ont été dites de la part du Seigneur ! »(Lc 1 39-45

Marie demeura avec Elisabeth environ trois mois, jusqu’au « temps » de la délivrance d’Elisabeth et s’en retourna dans sa maison.

C’est alors que la nativité de Saint Jean Baptiste se réalise, là aussi, au milieu des « merveilles » et de belles professions de foi.

Au milieu des merveilles :

« Le temps d’Elisabeth étant venu, elle enfanta un fils. Ses voisins et ses parents ayant appris que le Seigneur avait signalé en elle sa miséricorde, se réjouissaient avec elle. Le huitième jour, ils vinrent pour circoncire l’enfant, et ils le nommaient Zacharie, qui était le nom de son père. « Non, dit sa mère, mais il s’appellera « Jean ». Ils lui dirent : « Il n’y a personne dans votre famille qui soit appelé de ce nom ». Et ils demandèrent par signe à son père comment il voulait qu’on le nommât. S’étant fait apporter des tablettes, il écrivit : « Jean est son nom » ; et tous furent dans l’étonnement. Au même instant sa bouche s’ouvrit, sa langue se délia ; et il parlait, bénissant Dieu. La crainte s’empara de tous les habitants d’alentour et dans toutes les montagnes de la Judée on racontait ces merveilles ». (Lc 1 57-66)

Et c’est alors la belle profession de foi de Zacharie, un témoignage merveilleux, aussi beau que le Magnificat, aussi beau que le cantique de Siméon. Ecoutez et souvenez-vous en en ce temps de l’Avent pour en vivre :

« Et Zacharie, son père, fut rempli de l’Esprit-Saint, et il prophétisa, en disant : « Béni soit le Seigneur, le Dieu d’Israël, de ce qu’il a visité et racheté son peuple. Il nous a suscité un puissant Sauveur dans la maison de David, son serviteur, selon ce qu’il a dit par la bouche des saints prophètes aux siècles passés, un Sauveur qui nous délivrera de nos ennemis et des mains de tous ceux qui nous haïssent. Il a accompli la miséricorde promise à nos pères, et s’est souvenu de son alliance sainte, selon le serment par lequel il a juré à Abraham notre père de nous faire grâce, qu’étant délivrés des mains de nos ennemis, nous le servions sans crainte, dans la sainteté et la justice en sa présence, tous les jours de notre vie. Et toi, petit enfant tu seras appelé prophète du Très Haut ; car tu marcheras devant la face du Seigneur pour lui préparer les voies, pour donner à son peuple la connaissance du salut dans le pardon de ses péchés, par les entrailles de la miséricorde de notre Dieu, par lesquelles le Soleil levant nous a visités d’en haut, pour éclairer ceux qui sont assis dans les ténèbres et dans l’ombre de la mort et pour diriger nos pas dans la voie de la paix. ».(Lc 1 68-80)

Merveilleux ! Ce texte devrait être plus souvent médité par nos fidèles….Que cet Avent en soit l’occasion.

Le temps passe. Saint Jean Baptiste est au début de sa mission. Il est dans le désert de Judée (Mt 3 1). Il est « prêchant ». « Il avait un vêtement de poil de chameau et autour de ses reins, une ceinture de cuir et il se nourrissait de sauterelles et de miel sauvage » (Mt 3 4-5)

Alors, venaient à lui Jérusalem et toute la Judée et tout le pays qu’arrose le Jourdain (Mt 3 5)

Il prêche la pénitence. Il donne un baptême de pénitence. Il prêche aussi son témoignage. Son discours est ainsi composé : « faites pénitence car le royaume des cieux est proche : préparez le chemin du Seigneur, aplanissez ses sentiers » (Mt 3) ….Et toute chair verra le salut de Dieu ». (Lc 3 5)

Son témoignage est clair : « Moi je vous baptise dans l’eau. Mais il vient, celui qui est plus puissant que moi et dont je ne suis pas digne de délier la courroie de sa chaussure ; Lui, il vous baptisera dans l’Esprit-Saint et le feu. Sa main tient le van et il nettoiera son aire et il amassera le froment dans son grenier et il brûlera la paille dans un feu qui ne s’éteint point (Lc 3 15)

C’est ainsi qu’il parlait et rendait témoignage à la Lumière. « C’est par ces discours et beaucoup d’autres semblables qu’il annonçait au Peuple la Bonne Nouvelle » du salut (Lc 3 18)

Et Jésus, lui-aussi, vint au Jourdain recevoir le baptême de Jean : « Or, dans le temps que tout le peuple venait recevoir le baptême, Jésus aussi fut baptisé ». Lc 3 21)

Et c’est la magnifique théophanie que vous connaissez tous qui prouve et la divinité du messie et son rôle rédempteur : « Et pendant qu’il priait, le ciel s’ouvrit, et l’Esprit Saint descendit sur lui sous une forme corporelle, comme une colombe, et du ciel une voix se fit entendre : tu es mon Fils bien-aimé ; en toi j’ai mis mes complaisances. ». (Lc 3 22)

Mais Saint Jean multipliait les témoignages. Saint Jean l’évangéliste, les rapporte en son Evangile.

Tout d’abord dans son Prologue : « Et le Verbe a été fait chair, et il a habité parmi nous…Jean a rendu témoignage de lui, en disant à haute voix : Voici celui dont je disais : Celui qui vient après moi a été fait plus grand que moi, parce qu’il était avant moi ».Belle allusion à la divinité du Messie.

Et parmi ces témoignages divers de Saint Jean Baptiste, nous avons encore ceux-ci : « Le lendemain, Jean vit Jésus qui venait vers lui, et il dit : « Voici l’Agneau de Dieu, (voici celui) qui ôte le péché du monde. C’est de lui que j’ai dit : « un homme vient après moi, qui a été fait plus grand que moi parce qu’il était avant moi. Et moi, je ne le connaissais pas, mais c’est afin qu’il fût manifesté en Israël que je suis venu baptisé dans l’eau ». (Jn 1 29)

Et encore : « Et Jean rendit ce témoignage : « J’au vu l’Esprit descendre du ciel comme une colombe, et il s’est reposé sur lui. Et moi, je ne le connaissais pas ; mais celui qui m’a envoyé pour baptiser dans l’eau m’a dit : « Celui sur qui tu verras l’Esprit descendre et se reposer, c’est lui qui baptise dans l’Esprit-Saint. Je l’ai vu, et j’ai rendu témoignage que c’est lui qui est le Fils de Dieu ».(Jn 1 32)

Et encore : « Le lendemain, Jean se trouvait encore là avec deux de ses disciples. Et ayant regardé Jésus qui passait, il dit : « Voici l’Agneau de Dieu ». (Jn 1 35).

Voilà « Celui » qui accomplira toute rédemption par son sang et son sacrifice.

Et parce qu’il en est ainsi, parce qu’il est « l’Agneau de Dieu », en Lui se trouve toute paix, tout salut, toute réparation. Il est donc l’unique source de toute joie. En lui, la rédemption. En lui l’espérance du « Royaume de Dieu » et de sa possession. En Lui la plénitude de toute joie.
Voilà la raison du choix de cet épître de saint Paul aux Philippiens qui nous recommande si fortement d’entretenir par une foi ardente au Seigneur, « l’Agneau de Dieu », la joie dans nos cœurs « Réjouissez-vous sans cesse dans le Seigneur. Je le répète : réjouissez-vous…Le Seigneur est proche ».

Voilà la Bonne Nouvelle ! Voilà le secret du Bonheur. Réveillez enfin votre foi.

 

III – L’année eucharistique.

 

Comme chaque semaine maintenant, rendons gloire et honneur à la Sainte Eucharistie en étudiant, avec application le traité de Saint Thomas d’Aquin sur le sacrement de l’Eucharistie. ?

Nous en sommes arrivés à la question 74, à l’étude la matière de ce sacrement : le pain et le vin. Nous étudierons cette semaine les articles 3 et 4 consacrés au pain. Il faut que ce pain soit de « pur froment » et « sans levain ».

Les évangélistes Saint Mathieu, (Mt 26 26), Saint Marc ( Mc 14 22) et Saint Luc (Lc 22 19) nous apprennent que Notre Seigneur Jésus-Christ prit du pain , le bénit et le rompit en disant : « Ceci est mon corps ». Dans Saint Jean, le Seigneur se donne lui-même le nom de pain : « je suis le pain vivant descendu du ciel. »

Mais il y a plusieurs sortes de pain. Tantôt c’est dans la matière qu’il varie. Il peut être de froment, d’orge, voire même de riz ou d’autres fruits de la terre.
Tantôt ce sont les qualités seules qui sont différentes ; l’un renfermera du levain tandis que l’autre n’en contiendra pas
Or, Saint Thomas invoque Saint Jean 12 24-25 : « A moins que le grain de froment ne meurt, il reste seul ». Voici son argument dans le « sed contra » : dans ce sacrement est contenu le Christ. Qui se compare lui-même au pain de froment, quand il dit, en saint Jean, chapitre 12 v. 24-25 : « A moins que le grain de froment ne meure, il reste seul ». Donc le pain de froment est la matière de ce sacrement.

Dans le corps de l’article, Saint Thomas invoque deux raisons : l’usage ordinaire et le symbolisme.
L’usage ordinaire : selon le principe « pour l’usage des sacrements, on prend, dit Saint Thomas, cette matière qui vient le plus communément parmi les hommes pour l’usage qui s’y rapporte ». Or le pain le plus communément utilisé parmi les hommes c’est le pain de froment. C’est pourquoi, dans le langage ordinaire, ce mot employé simplement et sans modification - « je voudrais du pain - signifie le pain de froment seul
Le symbole : Ce pain de froment est fortifiant pour l’homme. Ainsi convient-il bien pour signifier l’effet de ce sacrement qui est souvent, de fait, appelé « le pain des forts ».

« A cause de cela, la matière propre de ce sacrement est le pain de froment ». « Et ideo propria matéria huius scarementi est panis triticeus ».(III 74 3)

Le catéchisme du Concile de Trente ajoute une autre raison : « Une figure de l’Ancien Testament vient encore conforter cette vérité. Le Seigneur avait ordonné que les pains de proposition, qui figuraient le sacrement de l’Eucharistie, fussent de pure fleur de froment. « (p.209)

Voilà pour l’essentiel de cet article 3.
Voyons l’article 4.

Le pain destiné à servir de matière pour l’Eucharistie doit être du pain de froment. Mais ce pain de froment peut se présenter dans un double état : ou à l’état de pain azyme ; ou à l’état de pain fermenté. Y a-t-il un de ces états qui soit nécessairement requis, ou, à tout le moins, qui s’impose et qu’on ait le devoir de choisir de préférence à l’autre. La question est délicate. Elle a suscité, dans l’Eglise, des controverses sans fin. Et encore aujourd’hui, pratiquement, les Latins et les Grecs, même orthodoxes ou catholiques, ne sont point parvenus à s’entendre. Les Grecs en effet, pensent que c’est avec du pain fermenté qu’on doit célébrer l’Eucharistie ; et ils disent que le Christ a célébré, pour la première fois, avec cette sorte de pain. Les Latins, au contraire, disent que c’est avec du pain azyme que le Christ a célébré ; et c’est avec du pain azyme qu’ils célèbrent. Saint Thomas va nous dire ce qui convient le mieux et ce que pratiquement chacun doit observer. C’est l’objet de l’article 4

Cet article est parfaitement construit.
Voyons cela de prêt.
Saint Thomas exposent d’abord quatre objections qui veulent prouver que « ce sacrement ne doit pas être fait de pain azyme ».
Première objection est la raison que nous présentent les Grecs. « Nous devons, dans ce sacrement, imiter l’institution du Christ. Or le Christ semble avoir institué ce sacrement avec du pain fermenté. Nous lisons en effet dans l’Exode au chapitre 12, que les juifs, d’après la loi, commençaient à user de pains azymes seulement le jour de Pâque, qui se célébrait à la quatorzième lune. Or le Christ a institué ce sacrement à la Cène, qu’il célébra avant le jour de la Pâque, comme Saint Jean l’enseigne au chapitre 12 verset 1 à 4. Donc nous devons, nous aussi, célébrer ce sacrement avec ce pain fermenté ».

La deuxième objection déclare que « les prescriptions légales de l’Ancien Testament ne doivent plus être observées au temps de la grâce, de la Nouvelle Loi. . Or l’usage des pains azymes fut une cérémonie légale dans l’Ancien Testament. Comme on le voit dans Exode ch.12. Donc dans ce sacrement de la grâce, par excellence qu’est l’Eucharistie, nous ne devons pas user de pains azymes. »

La troisième objection rappelle que le sacrement de l’Eucharistie est le sacrement de la charité, comme le baptême est le sacrement de la foi. Or le feu de la charité est signifié par le ferment, ou le levain comme on le voit dans St Mathieu : « Le Royaume des cieux est semblable au levain… (Mt 13 33). Donc ce sacrement doit être fait de pain fermenté ».

La quatrième raison nous dit que « l’état fermenté et l’état azyme sont des accidents du pain, qui ne varient pas son espèce. Or dans le baptême, on ne fait aucun cas de la différence accidentelle de l’eau. Qu’elle soit salée ou douce. Qu’elle soit froide ou chaude. Peu importe. C’est de l’eau. Donc dans ce sacrement de l’Eucharistie, il n’y a aucunement à se préoccuper que le pain soit azyme ou fermenté.

Dans l’argument « sed contra », Saint Thomas cite le droit canon où « le prêtre est puni qui a la présomption de célébrer la messe solennelle avec du pain fermenté et un calice de bois ».

Voyons la solution de ce problème exposé dans le corps de l’article.

Tout d’abord, Saint Thomas fait la distinction entre ce qui est nécessaire pour la validité du sacrement et ce qu’il convient seulement de faire pour la « licéité ». Le pain de froment est absolument requit pour la réalité du sacrement de l’Eucharistie. Sans pain de froment, l’Eucharistie n’est pas.
Il dit : « En ce qui touche à la matière de ce sacrement, deux choses peuvent être considérées, savoir : ce qui est nécessaire ; et ce qui est de convenance. Il est nécessaire que la matière soit du pain de froment, ainsi qu’il a été dit plus haut, sans lequel il n’y a point de sacrement. Mais il n’est pas de nécessité pour le sacrement que le pain soit azyme ou fermenté ; car le sacrement peut exister soit avec l’un soit avec l’autre ».

Toutefois, poursuit Saint Thomas, il convient que chacun garde le rite de son Eglise dans la célébration de ce sacrement. Or à ce sujet les coutumes des Eglises sont diverses. Saint Grégoire le Grand dit, en effet, dans son Registre : ‘L’Eglise romaine offre des pains azymes, pour ce motif que le Seigneur s’est incarné sans aucune impureté. Mais d’autres Eglises offrent du pain fermenté, parce que le Verbe du Père s’est revêtu de chair, comme le levain se mêle à la farine »

Saint Thomas en tire alors les conséquences : chacun doit suivre les coutumes de son Eglise.
« Il suit de là que si un prêtre dans l’Eglise des Latins péche en célébrant avec du pain fermenté, de même un prêtre grec, célébrant dans l’Eglise des Grecs avec du pain azyme, pécherait, comme ne gardant pas le rite de son Eglise ».

Cependant, ajoute saint Thomas, la coutume de l’Eglise Latine semble plus raisonnable : « La coutume de célébrer avec du pain azyme est plus raisonnable ».

Il nous donne plusieurs raisons :

D’abord en raison de l’institution du Christ qui institua ce sacrement le premier jour des azymes. C’est le témoignage formel de saint Mathieu au chapitre 26, 17 et de saint Marc au chapitre 14, 12 et de Saint Luc au chapitre 22, 7, jour où ne devait se trouver aucun reste de pain fermenté dans les maisons des Juifs ainsi qu’il est dit dans Exode chapitre 12 15-19. Ergo.

Ensuite, parce que le pain est proprement le sacrement du corps du Christ qui a été conçu sans aucune corruption. Et donc la raison des Grecs vaut moins que la raison donnée comme étant celle des latins.

Enfin, parce que cela convient mieux à la sincérité des fidèles qui est requise pour l’usage de ce sacrement selon cette parole de la première Epître aux Corinthiens (Cor 5 7-8 : « Le Christ, notre pâque, a été immolé : prenons notre repas dans les azymes de la sincérité et de la vérité.


L’usage des Grecs a cependant, lui aussi, sa raison d’être : soit pour la signification que nous donne saint Grégoire : « Mais d’autres Eglises offrent du pain fermenté, parce que le Verbe du Père s’est revêtu de chair, comme le levain se mêle à la farine » » ; soit comme rejet de l’hérésie des Nazaréens qui mêlaient à l’Evangile les observances légales ».

Donc concluons et résumons : le pain de froment, matière nécessaire du sacrement de l’Eucharistie, peut-être validement consacré, qu’il soit fermenté ou qu’il soit azyme. Mais pour la licéité, seul le pain fermenté doit être employé dans l’Eglise grecque ; et seul le pain azyme dans l’Eglise latine.

L’enseignement du catéchisme de Trente.

Il est intéressant de voir comment les auteurs du catéchisme du concile de Trente présente cette question du pain azyme, comme matière du sacrement de l’Eucharistie. On sera frappé de la fidélité de ces auteurs à la pensée de saint Thomas. C’est dire l’influence et l’importance de la pensée thomiste dans l’Eglise catholique.

Voici ce texte : « Mais si le pain de froment doit seul être regardé comme la matière de l’Eucharistie, (conformément à la tradition apostolique et à l’enseignement formel de l’Eglise catholique), il est facile de se convaincre que ce pain doit être sans levain, d’après ce que fit Notre Seigneur le jour où il institua ce Sacrement. C’est en effet le premier des azymes, et chacun sait que ce jour là il était défendu aux Juifs d’avoir du pain levé dans leurs maisons.
Si l’on oppose à cette doctrine l’autorité de Saint Jean l’Evangéliste, qui rapporte que tout cela se fit avant la fête de Pâques, il est facile de détruire cette objection. La fête des azymes commençait dès le soir de la cinquième férie, temps où le Sauveur célébra la Pâque. Et ce que les autres Evangélistes ont appelé le premier jour des azymes, Saint Jean l’appela la veille de Pâques, parce qu’il crut devoir noter surtout le jour naturel, dont la durée commence au lever du soleil. C’est pourquoi Saint Jean Chrysostome entend par le premier des azymes le jour où l’on devait, sur le soir, manger les azymes.
D’ailleurs la consécration du pain sans levain est en parfaite harmonie avec la pureté et l’innocence de cœur que les fidèles doivent apporter à la réception de ce sacrement. C’est ce que l’Apôtre nous apprend par ces paroles : « Purifiez-vous du vieux levain, afin que vous soyez une pâte nouvelle, comme vous êtes un pain azyme ; car Jésus-Christ est l’Agneau pascal immolé pour nous. Célébrons donc notre Pâque, non avec le vieux levain, ce levain de malice et d’iniquité, mais avec les azymes de la sincérité et de la vérité ».

Cependant cette qualité (pour le pain) d’être sans levain n’est pas tellement nécessaire, que le sacrement ne puisse exister, si elle venait à manquer. Le pain azyme et le pain levé conservent également le nom, les propriétés et toute la nature du pain véritable. Toutefois, il n’est pas permis à personne, de changer de son autorité privée, ou pour mieux dire d’avoir la témérité de changer la sainte coutume de son Eglise. Et cela est d’autant moins permis aux Prêtres de l’Eglise latine, que les Souverains Pontifes ont ordonné de ne célébrer les saints Mystères qu’avec le pain azyme ». (p 209-210)

Si cette dernière consigne avait été inculquée dans les séminaires, au temps précédent le Concile, nous n’aurions pas connu cette révolution liturgique. Au séminaire à Rome, à cette époque, que de bouleversements liturgiques, que de chambardements….Ceux-là qui, hier, « bricolaient » la liturgie avec leur « para-liturgie », se trouvent aujourd’hui, évêques ! On n’est pas prêt de retrouver l’ordre liturgique…Il faudrait rappeler le principe émis plus haut par les auteurs du catéchisme du Concile de Trente. Mais les évêques actuels n’ont jamais goûté intellectuellement, spirituellement ce principe du respect dû aux coutumes ancestrales de la Liturgie…Alors…Le souci bien légitime du pape n’est pas prêt d’être écouté…

 

IV - Le dogme de l’Immaculée Conception.

 

Pour l’honneur de Notre Dame
Pour venger l’affront public de Jacques Dusquesne, dans son livre « hérétique » : Marie publié, malheureusement, lors du voyage du pape à Lourdes, le 15 août dernier.

Oui, pour l’honneur de Notre Dame, pour venger sa grandeur bafouée par cet hérétique Jacques Dusquesne, j’ai la joie de vous donner à lire une belle homélie de Dom Delatte, abbé de Solesnes, donné en 1903.

O que je suis triste et colère de voir diffuser ce livre dans les librairies catholiques. Il aurait dû être interdit de diffusion. Il n’aurait jamais dû être mis à la disposition de fidèles. Leur piété sera assombrie par la lecture de ce livre. Je vous invite à aller visiter mon site Item et sa rubrique : Regards sur l’actualité religieuse et politique au 12 décembre. Cliquez ici.

Homélie de Dom Delatte : « L’immaculée conception, revanche de Dieu ».


Dieu n’a jamais essuyé de défaite.
A proprement parler, il n’a jamais eu besoin de revanche.
Et pourtant le premier fait de l’histoire,
Celui rapporté au chapitre III de la Genèse,
Et que la fête de l’Immaculée Conception nous a rappelé,
Ce fait ressemblait à un échec.
Il semble avoir déconcerté le dessein de Dieu.
Sans doute, le mode de réparation annoncé et promis, appliqué dès la première heure, avait restitué toute chose sur un plan nouveau
Et avec un tel surcroît que l’Eglise a pu dire : « O felix culpa, O certe necessarium Adae peccatum. » (O heureuse faute ! O nécessité du péché d’Adam ! bénédic.du Cierge pascal).

Mais enfin, Dieu semblait avoir eu le dessous dès la première heure et, par le fait de cette première faute, la postérité humaine était souillée, empoisonnée, vouée à la mort.

Aussi, dans le moyen qu’il prit pour renouveler l’humanité, Dieu semble avoir pris à cœur de donner à son effort le caractère et l’intention d’une revanche.
Elle fut complète.

Dieu s’appliqua à copier le procèdé diabolique qui avait souillé l’humanité entière.
Je ne fais que reproduire la doctrine de l’Apôtre saint Paul dans le cinquième chapitre de son Epître aux Romains.
Les éléments du triomphe diabolique sont :
- un homme unique
- un homme représentatif et en qui nous voyons sa race tout entière
- une faute commise par lui
- la chute ou la déchéance,
- la diffusion de cette faute,
- le corollaire dernier est la mort,
- la mort fruit du péché,
- ma mort indice du péché et témoignant, par son règne universel, par l’universalité de ses coups qui portent sur les justes eux-mêmes,
- sur ceux-là mêmes qui n’ont point péché,
- qui n’ont pas eu le loisir de pécher à l’exemple du premier Adam,
- que ce n’est non la personne, mais la nature qui est souillée et empoisonnée.

Telle est la victoire diabolique.

Pour répondre, il n’a pas suffi à Dieu d’une victoire quelconque, d’un grand succès remporté en compensation de l’échec premier.
Dieu, qui est glorieux et qui en a le droit, a voulu une revanche formelle et, comme un grand capitaine, surpris une fois traîtreusement sur un champ de bataille inconnu, le lendemain y ramène son adversaire, lui fait expier cruellement son premier succès et le ruine tout entier avec les mêmes procédés et la même tactique qui lui a valu son éphémère victoire, Dieu aussi a voulu un triomphe qui reproduisit les éléments et les conditions de la déchéance. Il a exigé que la vie se répandit dans l’humanité nouvelle par les mêmes voies où s’était répandue la mort :
-un homme unique
-un second Adam
-un homme type, chef, représentatif de toute l’humanité nouvelle et régénérée,
-une obéissance,
-une exaltation et un relèvement qui fussent la suite de cette obéissance,
-une diffusion, un retentissement de cette exaltation personnelle dans toute la postérité du second Adam,
-la vie surnaturelle,
-la vie éternelle comme corollaire dernier de cette victoire remportée par le Seigneur pour Lui,
-remportée pour nous.

Et comme s’il ne pouvait se rassasier de ce triomphe de Dieu, l’Apôtre nous montre que Dieu ne s’est point borné à marquer cette analogie harmonieuse qui existe entre la déchéance et la réparation ;
Il s’applique à montrer que le triomphe de Dieu a dépassé de l’infini le court succès de l’ennemi : « Sed non sicut delictum, ita et donum » ((Il n’en est pas de la grâce comme de la faute » Rm 5 15)
Il y a vraiment une différence de taille entre le premier et le second Adam : « Caput Christi Deus » (« Le chef du Christ c’est Dieu 1 Cor 11 3), et l’humanité est autrement grande.

Il y a une différence de qualité entre la vie en circulation par l’un et par l’autre.
Il y a une différence de surabondance. Et alors que :
- le fait du premier Adam part de lui et, selon le cours des temps, s’en vient infecter tous ceux qui successivement naissent de sa race,
- le fait du Christ rétrograde remonte à l’origine des choses, purifie par la foi et l’adhésion à Lui ceux qui Le devancent dans le temps. L’Agneau immolé dès l’origine du monde,
- -purifie dans la pourpre de son sang les justes qui L’attendent encore ;
- non seulement il garantit sa Mère contre toute souillure, mais d’avance, à cause d’elle et à cause de Lui, Il verse dans son âme sans tache toutes les beautés surnaturelles qui devaient Lui revenir :
- il la fait toute entière de grâce, de splendeur, de pureté.

Il y a une différence dans le point de départ :
- un péché a suffi pour souiller la nature humaine ;
- un amoncellement de péchés n’empêchera pas la grâce et la vie de passer.

Il y a une différence dans le résultat dernier, dans l’humanité régénérée qui n’est plus esclave, qui n’est pas seulement libre, qui règne, qui règne avec Jésus-Christ et s’assied sur le trône même de Dieu.

N’est-il pas vrai que la fête d’aujourd’hui, que les fêtes que nous attendons, que toute cette Octave de préparation à Noël nous permettent de compléter ce faisceau d’analogies que l’Apôtre a si fermement marquées entre la déchéance et la réparation ?

Il y eut un Ange qui présida à la chute,
Un autre qui eut sa part à la réparation. Il s’appelait la Force de Dieu ; c’est un duel : entre Dieu et son ennemi. Il aurait manqué quelque chose à l’harmonie si expressive de la scène si, à côté du Seigneur, ne se fût trouvée l’Eve nouvelle :
« Sumens illud Ave
Gabrielis ore,
Funda nos in pace
Mutans Evae nomen ».

« Accueillant cet Ave de la bouche de Gabriel, affermissez-nous dans la paix, changeant le nom d’Eva ».

Et vraiment ceci montre bien le cœur de Dieu. Je crois qu’il n’y a pas de commune mesure entre Dieu et nous et que les mots empruntés à nos langues, calqués sur nos expériences, appliqués à nos usages, ces mots changent de signification et de contenu lorsque nous les appliquons à Dieu. C’est pour cela qu’il faudrait, quand on parle de Lui et des mystères où il entre, une langue toute neuve et des mots qui n’eussent jamais servi. Je me laisse entraîner à croire pourtant qu’il y a un point sur lequel il y a rapprochement, contact, quelque chose de plus que l’analogie théologique, oui : une certaine parité, un procédé commun : je crois que Dieu aime comme nous.

N’est-il pas vrai que c’est bien divin, mais que c’est bien humain aussi que d’avoir voulu une mère, une mère à soi, et d’avoir voulu appartenir à l’humanité, d’avoir voulu prendre l’humanité en elle et par elle seule. C’est bien divin, mais c’est si humain aussi que l’avoir prédestinée, dans le même décret que l’Incarnation même, dans une éternelle intimité avec Lui,
- que l’avoir créée pour soi, pure et belle comme les Anges, plus que les Anges, d’avoir versé dans le cœur de Vierge tout ce qu’il pouvait - agrandi par Dieu même -, de la tendresse du Père, de la beauté du Fils, de la pureté du Saint-Esprit.

Et puis rendre hommage, Lui, Dieu, à cette créature ainsi composée, s’incliner devant elle, subordonner à elle l’accomplissement de ses éternels desseins, la traiter avec un filial respect, lui demander et attendre d’elle la place qu’Il voulait tenir dans sa création, et puis être son bien, à elle, son sang, sa chair, son Fils. Oui, je crois vraiment que Dieu aime comme nous, ou, si vous le voulez, que notre cœur est formé sur le sien, et que c’est par là, plus que par l’intelligence et la volonté pure, que nous Lui ressemblons.

La conclusion est bien naïve : c’est qu’il convient que cette ressemblance soit achevée, et que cette tendresse qui va de Dieu vers Notre Dame doit déterminer et provoquer la nôtre. Ce n’est pas de la dévotion, c’est simplement du christianisme. Je sais bien que l’affection ne se fait pas sur commande, et qu’on n’aime pas de confiance et par simple ouï-dire, mais par un mouvement spontané de l’âme.

Mais je sais aussi que notre âme obéit à notre foi, à notre charité, à l’exemple de Dieu même. En commençant par un vrai mois de Marie chacune des années liturgiques, l’Eglise n’a-t-elle pas voulu nous suggérer cette vérité d’expérience que c’est par Notre Dame que le Seigneur nous vient toujours, que ce serait une erreur préjudiciable dans la vie chrétienne que de ne pas constituer pour Notre Dame, en notre piété, la place que Dieu même lui a donnée dans sa tendresse, en un mot, que ce n’est pas un vrai christianisme, mais une forme quelconque du nestorianisme, que l’amoindrissement de la dévotion à la Sainte Vierge. Alors même que l’histoire de l’Eglise ne nous en fournirait pas la preuve, regardons seulement à la profondeur où elle a été portée dans les desseins de Dieu : ce sera le commencement d’une dévotion théologique.
Si nous sommes conséquents avec cette dévotion théologique, la dévotion de cœur et de tendresse viendra. Ainsi soit-il.
« Missus est » 1903.

 

V - Fatima…Encore du « nouveau »

 

Jeanne Smits, dans Présent du samedi 4 décembre 2004, dans un article intitulé : « Fatima et le « dialogue interreligieux. Une nouvelle mise au point », publie un extrait ou la totalité d’un texte de Mgr Serafin de Sousa Ferreira concernant le « fameux » accueil des hindous dans la petite chapelle des apparitions, ainsi que l’usage auquel sera réservée l’église de la Très Sainte Trinité, actuellement en construction.

Vous trouverez ci-dessous :
A- le texte de l’évêque exprimant sa pensée sur cette affaire.
B- Je le ferai suivre des « commentaires de Jeanne Smits ».
C- puis de quelques appréciations plus personnelles.

Mais d’abord, je me réjouis de ce que l’évêque ait annoncé dans son communiqué l’ouverture procès de canonisation des deux petits de Fatima, le 13 octobre 2004. Ceci dit, voyons le texte

A - Le texte

a- concernant la prière des hindous.


« Le 19 avril 2004 une communauté hindoue de Lisbonne d’environ 50 personnes a visité le sanctuaire, accompagnée de son responsable religieux, qui est monté près de la statue de la Très Sainte Vierge, à qui il a chanté un chant pour la paix. Peut-être y a-t-il eu un peu de complaisance de la part des fonctionnaires (« préposés », ndlr) qui les ont accueillis, mais tout s’est déroulé dans la dignité. Nous avons déjà expliqué qu’il ne s’agissait pas d’une célébration interreligieuse. En recourant à Notre Dame de Fatima, nos frères hindous ont sincèrement témoigné qu’ils acceptent son intercession maternelle en faveur de tous les hommes. A l’avenir nous ferons beaucoup plus attention, pour qu’il n’y ait plus d’interprétations ambiguës. »

b- concernant la nouvelle basilique :

Cette basilique « sera un grand espace de culte catholique et d’évangélisation, avec d’autres activités de l’ensemble de la pastorale du sanctuaire, en particulier le sacrement de la réconciliation ».

B –l’Article de Jeanne Smits dans Présent du 4 décembre.

« Après les mises au point, communiqués et démentis du recteur du sanctuaire de Fatima, Luciano Guerra, de plus en plus en retrait par rapport au message « œcuménique » diffusé (mais aussi déformé par la presse) à l’occasion de la tenue d’un colloque à Fatima sur « le Présent de l’homme, le Futur de Dieu », l’évêque de Leiria-Fatima s’est exprimé à son tour. Il l’a fait en des termes qui confirment ce que nous avions pressenti à Fatima en enquêtant sur l’affaire de la nouvelle église de la sainte-Trinité, présentée par nombre de publications catholiques comme un futur sanctuaire interreligieux, et sur l’autre affaire : celle de l’accueil de religieux hindous à l’autel même de la Capelinha des apparitions.
Nous avions perçu alors une réelle gêne des responsables du sanctuaire qui, outre leurs démentis formels à propos de l’utilisation interreligieuse de la future église, avaient progressivement précisé, dans le sens catholique, leur affirmation du caractère spécifiquement catholique du sanctuaire de Fatima (Présent du 28 août).
Mgr Serafin de Sousa Ferreira s’est exprimé en ces termes, le 12 octobre, sur l’accueil des hindous : « Le 19 avril 2004 une communauté hindoue de Lisbonne d’environ 50 personnes a visité le sanctuaire, accompagnée de son responsable religeux, qui est monté près de la statue de la Très Sainte Vierge, à qui il a chanté un chant pour la paix. Peut-être y a-t-il eu un peu de complaisance de la part des fonctionnaires (« préposés », ndlr) qui les ont accueillis, mais tout s’est déroulé dans la dignité. Nous avons déjà expliqué qu’il ne s’agissait pas d’une célébration interreligieuse. En recourant à Notre Dame de Fatima, nos frères hindous ont sincèrement témoigné qu’ils acceptent son intercession maternelle en faveur de tous les hommes. A l’avenir nous ferons beaucoup plus attention, pour qu’il n’y ait plus d’interprétations ambiguës. »

On peut se satisfaire ou non de ce communiqué, et juger que l’interprétation des faits, quelle qu’elle soit, n’efface point la profanation. Mais il est en tout cas important de constater l’existence de ce nouvel engagement de la part des autorités religieuses portugaises, et de noter que ce communiqué constitue assez clairement un désaveu.

Mgr de Sousa rappelle dans le même communiqué l’usage auquel sera réservée l’église de la Très Sainte-Trinité, avec sa première pierre extraite du tombeau de saint-Pierre, offerte par Jean-Paul II : « ce sera un grand espace de culte catholique et d’évangélisation, avec d’autres activités de l’ensemble de la pastorale du sanctuaire, en particulier le sacrement de la réconciliation ».

Par ailleurs est annoncée l’ouverture officielle, le 13 octobre dernier, de la procédure de canonisation des bienheureux Jacinta et Francisco Marto.

Notons enfin que le bulletin officiel du sanctuaire, Fatima luz e Paz, contient un article des plus traditionnels sur la prière et le sacrifice pour les pécheurs, sous le titre « Beaucoup d’âmes vont en enfer… »

Les différentes protestations recueillies par le sanctuaire à l’occasion des informations diffusées à propos d’un inacceptable œcuménisme ne sont assurément pas étrangères à ces prises de position de plus en plus nettes de la part du père Guerra et de Mgr de Sousa. L’honnêteté exige d’en rendre compte, comme l’a fait Aletheia, la Lettre d’information religieuses d’Yves Chiron ». Jeanne Smits(Présent du 4 décembre 2004)

C – Quelques précisions plus personnelles

Jeanne Smits a raison de remarquer que les protestations qui se sont élevées à l’occasion
-du Congrès interreligieux réuni à Fatima sur le thème : « Le Présent de l’homme, le Futur de Dieu »
-de la présentation de la maquette de la Nouvelle basilique
-de la présence des hindous dans la petite chapelle des apparitions
« ne sont assurément pas étrangères » aux prises de position actuelles des autorités religieuses du sanctuaire et aujourd’hui de son évêque.
Il est vrai aussi de dire que ces « prises de position » des autorités sont « de plus en plus nettes ».

C’est une simple honnêteté intellectuelle de le reconnaître. C’est très vrai. Il y a une différence vraie entre le « silence » qui peut être approbateur et une parole exprimée qui peut être « un désaveu ».

Est-ce vraiment un « désaveu » comme l’affirme Jeanne Smits ? Je le voudrais bien. Je le souhaite. Je n’en suis pas aussi sûr qu’elle.
Oui, malgré la gentillesse de Jeanne Smits, malgré « l’honnêteté intellectuelle » d’Yves Chiron, j’ai du mal à être totalement convaincu de l’absolu et de la totale « franchise » des autorités religieuses du sanctuaire. Je voudrais qu’Yves Chiron et Jeanne Smits aient raison. Je voudrais me tromper. Mais je crains vraiment. Le mouvement œcuménique et les réunions interreligieuses sont tellement entrés dans les mœurs ecclésiastiques que ces « dénégations » pourraient n’être que pures formalités, voulant apaiser des cœurs inquiets, échauffés et hostiles à « l’aujourd’hui » de l’Eglise, comme ils disent.

Hier, je prenais à partie la phrase de Mgr Guerra .

Aujourd’hui, permettez-moi, de relever la phrase de Mgr de Sousa.

Il écrit : cette basilique « sera un grand espace de culte catholique et d’évangélisation, avec d’autres activités de l’ensemble de la pastorale du sanctuaire, en particulier le sacrement de la réconciliation ».

« De l’ensemble de la pastorale du sanctuaire »…Mais précisément la « pastorale du sanctuaire » comprend, certes, la pratique de la « réconciliation », mais bien aussi les réunions œcuméniques ainsi que les réunions interreligieuses.
La meilleure preuve de ces mœurs nouvelles et de cette pastorale « new look « , c’est la présence, par exemple, annoncée du cardinal de Lisbonne à la grande réunion de Taizé qui doit se tenir, début janvier 2005, à Lisbonne. Le cardinal, chez les protestants ! Hier, ce geste aurait fait scandale. Aujourd’hui, je passe pour « ringard » en osant mettre simplement en question la chose. L’œcuménisme est entré dans les mœurs…C’est une pastorale « conciliaire ». Ce n’est plus simplement le pape qui pratique exceptionnellement l’œcuménisme, qui va à la Synagogue, à la Mosquée, au Temple. Ce sont les évêques eux-mes, les cardinaux. Il ne se fait pas une seule visite pastorale de l’évêque d’un diocèse sans « rencontres œcuméniques », sans « réunions interreligieuses ». Alors me dire que cette nouvelle basilique « sera un grand espace de culte catholique, avec d’autres activités de l’ensemble de la pastorale du sanctuaire », ne me suffit pas.

Certes, tout comme Yves Chiron, tout comme Jeanne Smits, je prends acte de ces nouvelles déclarations. Je m’en réjouis. Et sous ce rapport, je crois vraiment que nos actions ont porté des fruits, comme hier, maître Tarasconi a gagné face à Mgr Etchégaray, voulant transformer le sanctuaire de la Madone et créer en sous-sol une « mosquée ». Mais au prix de quel combat ! Toutefois, elles ne m’apaisent pas encore tout à fait.

Il en est de même de la phrase de notre bon évêque disant à propos d’éventuels nouveaux actes œcuméniques ou interreligieux ( ce n’est pas la même chose !): « A l’avenir nous ferons beaucoup plus attention, pour qu’il n’y ait plus d’interprétations ambiguës. », il ne dit pas qu’il n’y aura plus, à l’avenir, de gestes œcuméniques ou interreligieux - il serait imprudent, on pourrait lui rappeler son papier du 12 octobre 2004 - il dit simplement qu’il veillera à ce « qu’il n’y ait plus d’interprétations ambiguës ». Ca vous tranquillise ! Moi pas !

Jeanne Smits, n’oubliez pas l’interrogation qui terminait votre « enquête » de la fin mai 2004.