Paroisse catholique Saint Michel

Dirigée par

 Monsieur l'abbé Paul Aulagnier

 

06 80 71 71 01

 

Du 10 au 16 avril 2005

Deuxième dimanche après Pâques

 

Sommaire

 

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l'organisation. N'attendez pas le dernier jour, comme on le fait d'habitude.
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Du Mystère de l’Incarnation

Méditation

 

Le mystère de l’Incarnation sera maintenant, à partir de cette « paroisse saint Michel » , l’objet de notre méditation.
Dans la « Somme » de Saint Thomas, ce mystère fait l’objet de la IIIa pars, de la troisième et ultime partie de la « Somme ».
Il commence par un « prologue » qui retiendra notre attention.

Le Prologue

Voici le texte de ce prologue : « Parce que notre Sauveur, le Seigneur Jésus-Christ, au témoignage de l’Ange, en sauvant son peuple de leurs péchés (Mt 1 21), nous a montré en Lui-même la voie de la vérité, par laquelle nous puissions, en ressuscitant, parvenir à la béatitude de l’immortelle vie, il est nécessaire, pour l’achèvement de toute l’œuvre théologique, qu’après la considération de la fin dernière de la vie humaine et des vertus et des vices, suive notre considération de Sauveur même de tous et des bienfaits octroyés par lui au genre humain. Et à ce sujet, nous aurons à considérer : premièrement, le Sauveur Lui-même ; secondement, la fin de l’immortelle vie, à laquelle par Lui nous parvenons en ressuscitant. Sur le premier sujet, une double considération se présente : la première regarde le mystère même de l’Incarnation, selon que Dieu pour notre salut s’est fait homme ; la seconde les choses que notre Sauveur Lui-même, c’est-à-dire Dieu incarné, a faites ou souffertes ».

Dans ce très court mais substantiel et savoureux prologue, Saint Thomas nous précise ce qui doit être l’objet de la troisième partie de la « Somme Théologique ». Il nous en dit le pourquoi.

L’objet d notre méditation

L’objet de cette Troisième Partie n’est pas autre que le Sauveur même du genre humain, NSJC selon qu’en Lui se trouve pour nous la voie de la vérité, par laquelle il nous soit possible de parvenir, en ressuscitant, à la béatitude de l’immortelle vie. Cette voie de vérité ou cette route sûre qui seule peut nous permettre d’atteindre , en ressuscitant d’une résurrection glorieuse, la béatitude de l’immortelle, c’est une vie de mise en œuvre de toutes les vertus, à l’exclusion de tous les vices, où se trouvera pour nous le remède au mal du péché que nous portons tous, en nous, du seul fait de notre naissance, et qui, nous vouant à la mort, ne peut être réparé pleinement que par la puissance victorieuse de la mort elle-même.

Il s’agit donc d’un pouvoir de reconstitution qui nous assure la vie éternelle en nous délivrant du péché et de la mort. Ce pouvoir de reconstitution est attaché à la personne de Celui que l’ange définissait lui-même, en apportant son nom du ciel à la terre : le Sauveur de son peuple : « Celui qui devait sauver son peuple de leurs péchés ». De là vient que Saint Thomas au début d la Somme théologique annonçait la troisième partie en ces termes : « Du Christ, qui, en tant qu’homme, est, pour nous, la voie pour tendre vers Dieu ».

Le Christ devait être cette voie, à un double titre : d’abord, parce qu’il devait nous donner, dans sa Personne, en tant qu’homme, l’exemple parfait de toutes les vertus ; et ensuite, parce qu’Il devait, par ses mérites et sa vertu souveraine, nous faire triompher de tout mal et nous donner d’arriver, avec Lui, en marchant sur ces traces, à la béatitude de l’immortelle vie.

C’est l’étude de cette voie que nous entreprenons maintenant dans le mystère de l’Incarnation.

La « voie de vérité » ou de vie

Si nous voulons caractériser d’un mot cette voie de la vérité, nous conduisant au salut, qui a sa concrétion dans la Personne même de Sauveur, nous pourrions et devrions dire qu’elle consiste à mourir. C’est en mourant sur la Croix, que le sauveur Lui-même est arrivé, dans son corps réel, à la vie glorieuse de sa résurrection. C’est en Le suivant dans sa mort, que l’Eglise, son corps mystique, doit parvenir, elle aussi, à la même résurrection glorieuse
C’est donc bien la voie de la vérité ou la loi de la vie, que nous allons étudier maintenant en étudiant ce qui a trait au Sauveur des hommes et aux biens octroyés par Lui au genre humain.

Or nous verrons bientôt, et saint Thomas nous en avertit déjà dans son Prologue, cette voie de la vérité ou de la vie réalisant dans toute sa perfection le retour à Dieu de l’homme venu de Dieu, ne sera pas et ne devait pas être une autre voie que Dieu Lui-même fait homme pour ramener l’homme à Lui. Nous allons donc maintenant étudier cette œuvre nouvelle de Dieu, qui est l’œuvre de notre salut par les mystères accomplis dans sa Personne

Saint Thomas va étudier le mystère même de l’Incarnation, selon que Dieu pour notre salut s’est fait homme. C’est l’étude du Rédempteur, considéré en Lui-même. Puis il étudie ce que notre Sauveur, ou le Dieu incarné, a fait et souffert parmi nous . C’est la Rédemption
Nous allons donc nous occuper du Rédempteur ou de notre Sauveur dans le mystère de l’Incarnation.

Et sur ce sujet, trois choses se présentent à l’étude : premièrement la convenance de l’Incarnation elle-même ; secondement, le mode de cette union du Verbe incarné ; troisièmement, les choses qui sont la suite de cette union.

Le fait de l’Incarnation

On remarquera que Saint Thomas ne se préoccupe pas d’établir le fait de l’Incarnation, il le suppose. Ce fait appartient par excellence aux données de la foi. La raison théologique part de ces données et en cherche le sens. Acceptant le Credo de l’Eglise catholique, il applique sa puissante raison à nous en faire entendre les belles harmonies

Nous ne nous attarderons pas à établir le fait de l’Incarnation. Nous le recevons de l’Evangile.
Cependant nous allons reproduire ici son très court chapitre de la « Somme contre les Gentils » où saint Thomas donne en quelques mots, le résumé le plus serré et le plus probant des raisons d’ordre positif qui établissent ce mystère. C’est le chapitre 27 du livre 4.
Le voici dans sa concision.

« Le mystère de l’Incarnation est celui qui, parmi toutes les œuvres divines, dépasse le plus la raison ; car il ne peut être rien conçu de plus merveilleux, accompli par Dieu, que le vrai Dieu, Fils de Dieu, se fit vrai homme. Et, parce que , parmi tout le reste, ce fait est le plus merveilleux, il s’ensuit qu’à la foi de ce fait si merveilleux sont ordonnées toutes les autres merveilles » ou tous les autres miracles dans l’œuvre de Dieu ; « ce qui est le premier, en tout genre, étant la cause et la raison de tout ce qui suit.
« Or c’est sur l’autorité divine, nous la livrant, que nous confessons cette merveilleuse Incantation de Dieu. Il est dit, en effet : « Et le Verbe s’est fait chair ; et il a habité parmi nous » (Jn 1 15) et l’Apôtre dit parlant du Fils de Dieu : « Alors qu’Il était dans la forme de Dieu, Il n’a pas considéré comme une chose à retenir jalousement d’être l’égal de Dieu ; mais Il s’est anéanti Lui-même, prenant la forme de l’esclave, devenu semblable aux hommes, et tenu extérieurement pour homme » (Ph 2 6-7) La même chose est aussi montrée manifestement par les paroles du Seigneur Jésus-Christ Lui-même, alors que parfois Il dit de Lui des choses humbles et humaines comme est cette parole : « Le Père est plus grand que moi » (Jn 14 28) ; et, « Mon âme est triste à mourir » (Mt 26 38) qui lui conviennent selon la nature humaine qu’Il a prise ; et d’autres fois, des choses sublimes et divines, comme cette parole : « Moi et le Père sommes un »(Jn 10 30), et : « Toutes choses qu’a le Père sont à moi » (Jn 16 15), qu’il est certain qu’elles lui conviennent selon la nature divine. La même chose est montrée aussi par les faits du Seigneur Lui-même que nous lisons de Lui. Car le fait qu’il a éprouvé la crainte, qu’il a été triste, qu’il a eu faim, qu’il est mort, tout cela appartient à la nature humaine ; et le fait que par sa propre puissance, Il a guéri les infirmes, qu’Il a ressuscité les morts et commandé efficacement aux éléments du monde, qu’il a chassé les démons, qu’Il est ressuscité des morts quand Il l’a voulu et qu’enfin Il est monté aux cieux, tout cela démontre en Lui la vertu divine ».

Ces faits que vient d’évoquer Saint Thomas, l’Evangile en est plein ; les textes qu’il a cités sont tout ce qu’il y a de plus inéluctable ; et soit ces faits soit ces textes , tout cela proclame qu’au milieu des temps et en plein soleil de l’histoire a paru sur notre terre un Personnage unique dont il faut dire , sous peine de nier l’évidence, qu’Il a été ensemble vrai Dieu et vrai homme.

Cette présentation faite, commençons sans attendre notre méditation.

Et tout d’abord abordons la problème de la convenance de l’Incarnation. C’est la Question Ier

Question I :de la convenance de l’Incarnation


Article 1 : « S’il était convenable que Dieu s’incarne » ?

Dans le corps de l’article saint Thomas fixe tout de suite notre attention sur ce mot convenir, qui est le mot essentiel de cet article.
Il est question de déterminer si c’est une chose qui convient à Dieu, de s’unir la chair qui est le propre de la nature humaine.

Saint Thomas formule ce principe inéluctable -c’est même la définition de mot convenir - que « cela convient à tout être, quel qu’il soit, qui appartient à cet être selon la raison de sa propre nature : c’est ainsi que c’est chose qui convient à l’homme de raisonner, parce que cela lui revient en tant qu’il est raisonnable de sa nature ». et qu’en effet, l’être, dont la nature a pour caractère propre et distinctif d’être raisonnable ou de pouvoir raisonner, raisonne, quoi de plus convenable à cet être ou de plus en harmonie avec lui.

Tout cela est évident.

« Or la nature de Dieu est la bonté »

« Il s’ensuit que tout ce qui appartient à la raison de bien » ou de bonté « convient à Dieu » et lui convient au plus haut point.

« D’autre part il appartient à la raison de bien qu’il se communique aux autres » ; car le propre de ce qui est bon est de se communiquer. De même qu’il appartient au soleil d’éclairer, de même il appartient à ce qui a l’être dans sa pleine et parfaite mesure, ce qui est le propre de l’être qui est bon, de communiquer autour de soi ou de faire rayonner cet être dont il a la plénitude.

« D’où il suit qu’à la raison du Bien souverain il appartient qu’Il se communique d’une manière souveraine à la créature : chose qu’il se fait au plus haut point par cela qu’Il s’unit une nature créée de telle sorte qu’une seule Personne soit constituée de trois choses : le Verbe, l’âme et la chair. Et donc il est manifeste qu’il a été convenable que Dieu s’incarne ».

Rien n’était plus en harmonie avec ce qui constitue l’essence même de Dieu, savoir la raison même de Bonté, que de se communiquer à sa créature à ce degré souverain qu’Il prend cette créature en sa propre Personne et que par suite Lui-même devient elle.

Ainsi si quelque chose fait éclater l’infinie excellence de la bonté de Dieu, c’est bien qu’Il ait conçu et réalisé cet excès d’amour et de miséricorde ou de compassion de s’unir notre chair pour notre salut. « Conveniens tamen fuit Deo, secundum infinitam excellentiam bonitatis eius, ut sibi eam uniret pro salute humana », dit saint Thomas.

Ainsi que Dieu se soit incarné, c’est un fait que la foi nous révèle.

Ce fait implique évidemment un rapport nouveau de Dieu à la créature : Dieu s’est fait chair. Il semblerait, il est vrai, au premier abord, que les deux termes unis dans cette proposition s’opposent irréductiblement et que par suite la raison ne saurait l’accepter. Il n’en est rien.

Outre que ce que la foi nous dit est de tout point convenable et harmonieux -c’est une raison supérieure - il y a encore que nous pouvons donner une raison immédiate et tout à fait propre qui montre en pleine lumière, la parfaite convenance du rapport inclus dans la proposition que la foi nous affirme. C’est qu’en effet ce rapport marque essentiellement une communication de Dieu à la créature et même sa communication la plus haute et la plus excellente ; puisqu’il nous montre Dieu, prenant, pour se l’unir personnellement, ce qu’il y a de plus éloigné de Lui dans son œuvre. Cette communication est évidemment un acte de bonté, et un acte de bonté infinie. Or Dieu est essentiellement la Bonté même. Il s’ensuit que rien ne pouvait être plus en harmonie avec ce qui lui convient le plus en propre, que de s’unir, comme il l’a fait, à sa créature, en prenant une chair semblable à la notre dans le mystère de son Incarnation.

Merveilleuse affirmation de saint Thomas l’Incarnation est une mystère où éclate la bonté de Dieu.

Ce que confirme l’Ecriture Sainte qui, en saint Jean, déclare : « Dieu a tellement aimé le monde qu’il a donné son Fils unique afin que quiconque croit en Lui ne périsse pas mais ait la vie éternelle ».(Jn 3 16)

Dieu, par le mystère de son Incarnation a daigné communiquer à sa créature, dans la nature humaine qu’Il s’est unie, ce degré souverain de dignité et de gloire, qu’elle est à Lui, qu’elle est sienne, qu’IL est en elle, qu’Il est elle, qu’en l’ayant, elle, c’est Lui que nous avons, Il s’est fait chair ! Il est chair désormais et pour toujours

C’est le témoignage suprême de sa bonté, de son amour ; alors, surtout qu’Il l’a fait pour la réparation ou la restauration et le salut du genre humain perdu par le péché.

J’adore et j’aime contempler ce mystère.